jeudi 11 mars 2010, par
Escapades
Donner le contexte, situer un groupe, ou alors trouver une accroche digne, voilà ce qu’il faut à un premier paragraphe. Faute de phrase-choc liminaire, vous aurez droit à du descriptif. Clogs est à la base un duo formé de Bryce Dessner et Padma Newsome, deux musiciens surtout connus pour faire partie deThe National. Pour ceux qui aiment les analogies faciles, disons que Clogs est à ce groupe ce que Bell Orchestre est à Arcade Fire. Ceci est leur cinquième album, et le premier à ne pas être instrumental. Ils se sont logiquement entourés et on remarque au casting un certain Sufjan Stevens, ainsi que d’autres qu’on mentionnera en temps utile.
En pôle position, Cocodrillo me rappelle le pourtant fort irritant album de Fredo Viola. En plus réussi, certes, mais l’entrée en matière n’est pas optimale, surtout que le reste est bien plus réussi.
La plus fréquente vocaliste sur cet album est celle de Shara Worden (My Brightest Diamond). On serait bien ingrats de se plaindre de ce timbre proche du chant lyrique car après quelques écoutes, On The Edge (déjà présent sur l’EP Veil Waltz) est touchant et captivant. On la retrouve également sur l’également réussi Owl Of Love, dont la jolie mélodie fait un peu années ’50 (1750 je veux dire) et sur le bien plus âpre et moins accessible Adages Of Cleansing. Le choix de cette voix les rend un peu austères mais une fois qu’on a admis cette ambiance intemporelle (voir du côté de Joanna Newsom), il s’en dégage une classe certaine.
Ce type de musique court toujours le risque de sonner comme de la musique de film dépourvue de son support visuel pour les morceaux instrumentaux du milieu de l’album. C’est pour moi le seul moment de relâche entre des choses meilleures. Et les choses meilleures incorporent du rythme, comme dans les bons moments de Bell Orchestre, et I Used To Do profite d’une conjonction d’une guitare et de violons qui l’appuient. C’est puissant et fort comme dans les bons Canadiens du label Constellation. Dans le rayon canadien, cette musique plaira aussi à ceux qui se sont frottés avec succès à Owen Pallett.
Sur Red Seas, c’est Padma Newsome qui chante mais c’est surtout la seconde partie instrumentale du morceau, forte et subtile à la fois, qui séduit. Il est toujours aussi difficile de décrire une réussite musicale. On va se contenter de la conseiller.
On reconnaît fort facilement la voix de Matt Berninger sur Last Song. Et c’est peu dire que cet arpège entêtant complète bien son timbre. Le morceau est donc logiquement magnifique, comme le sont les morceaux lents de The National (Daughters Of The Soho Riots, ce type de réussite) mais avec un accompagnement plus organique, The National est un groupe de rock après tout, ce qui est spécialement palpable en concert. Autre réussite (elles ne sont pas rares, vous l’avez constaté), le final We Were Here (avec notamment Sufjan Stevens) est le genre de berceuse collective rêvée qui conclut fort joliment l’album.
Souvent accessible, parfois exigeant, occasionnellement enchanteur, cet album de Clogs séduit par sa beauté austère et son humanité sous-jacente. Les projets de gens talentueux bien entourés peuvent avoir ce résultat enthousiasmant. Si à ce stade de la lecture les noms mentionnés ne vous ont pas repoussé, vous savez que l’écoute est à prévoir (si ce n’est fait).
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