jeudi 15 avril 2010, par
Comme une chicken pie
Difficile de dire si les Arctic Monkeys ont ouvert une brèche où se seraient engouffrés ces innombrables combos scarifiés à l’Union Jack jusqu’à en avaler leur fish & chips de travers. Peut-être la bande à Alex Turner a-t-elle simplement offert un peu plus de lumière à maints jeunes Britons qui n’ont jamais cessé de se retrouver après le foot pour chanter l’Angleterre post-Thatcher, et qu’elle n’est que la partie visible d’un iceberg qui sent les beans et la stout.
Quoi qu’il en soit, les années 2000’s n’auront pas été avares de nouvelles gouapes adeptes d’un rock prolétaire écrit au rasoir, et devant autant à l’âge d’or de la britpop qu’à son glorieux passé, Kinks et Specials en tête. Si, d’une part, tous ces groupes confirment le lourd héritage socio-économique de leur pays, on peu constater d’autre part que la musique qui en découle est si culturellement marquée qu’elle peine à traverser la Manche.
Prophètes en leur pays mais rarement au-delà, des gens comme Keith, les Rifles, les Rumble Strips, Glasvegas ou encore The View ont pourtant tous publié au moins un bon album. Derniers de la classe, les Courteeners avaient quant à eux laissé une impression mitigée avec "St. Jude", un coup d’essai qui partait bien mais s’effilochait par la suite. Contre toute attente, ils reviennent avec un deuxième bulletin bourré de bonnes notes. Pas de quoi inquiéter les singes polaires et l’ami Turner, seuls à qui l’on peut déjà garantir la postérité, mais une agréable surprise quand même.
S’ouvrant sur une épopée miniature au titre longuement réfléchi (The Opener), "Falcon" signale d’emblée deux choses. D’abord, que les textes de Liam Fray sont de plus en plus intimistes ; en étant pour ainsi dire... privatisés, ils tendent justement moins vers la private joke nationale que vers une certaine forme d’universalité (« How can I create a work of art / Angled over a dishwasher that just won’t start ? » demandera-t-il plus loin sur Cross My Heart & Hope to Fly). La seconde constatation, c’est que la qualité mélodique, de même que le son qui la soutient, se sont considérablement amplifiés.
L’an dernier, The Enemy avait emprunté le même type de virage avec un "Music for the People" ne laissant aucun doute quant à l’intention, mais ça ne m’avait pas parlé. Les Courteeners, en revanche, dosent plus efficacement maniérisme pop et réflexes du lad-rock, en les diluant dans un chant presque dépourvu d’arrogance. Truffé comme une chicken pie de chœurs mi-hooligans mi-chanteurs à la croix de bois, "Falcon" prodigue son lot de refrains accrocheurs (Take Over the World, Sycophant) mais aussi un bon rock discoïde à la Electric 6 (You Overdid It Doll) et une belle balade dans les herbes folk (The Rest of the World Has Gone Home).
Seule ombre au tableau, à la fin de l’album les Courteeners viennent jouer les resquilleurs sur le terrain des Editors. Scratch Your Name Upon My Lips tend ainsi le bâton pour se faire battre en adressant de vilains clins d’œil à l’emopunk pour ados ricains. Will It Be This Way Forever, en revanche, parvient à déjouer ce piège en maintenant une saine tension. On ne peut pas jouer sur plusieurs tableaux et gagner à tous les coups, preuve que le groupe peut encore mûrir.
On n’attendait pas vraiment les Courteeners au tournant, ce qui justifie sans doute l’enthousiasme suscité par ce deuxième effort. Évidemment, ceux qui ne jurent que par l’indie-rock nord-américain risquent de trouver ça grossier. De même que les Inuits ont des dizaines de mots pour désigner toutes les nuances du blanc, il y a pourtant lieu ici d’éviter les amalgames béotiens et de distinguer un album de rock pour pubs qui sort franchement du lot. "Falcon" procure un vrai plaisir parce que les chansons sont finement écrites et réussissent l’équilibre entre pompiérisme et modestie (« I’m only a paperboy from the North West », reconnaît Fray sans crâner). Il ne leur manque plus que le sens de l’humour, et l’avenir s’annoncera brillant.
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