mercredi 16 juin 2010, par
Non, pas eux !
Les conditions d’écoute d’un album, je ne vous l’apprendrai certainement pas, peuvent parfois bouleverser la destinée intime qu’il accomplira dans nos parcours personnels. Ainsi, la musique panoramique des Islandais de Hjaltalín – dont je vous entretenais encore il y a peu – a bien failli se prendre une volée de bois vert au terme d’une première écoute au casque de “Terminal”, leur déroutant nouvel album. On a frôlé le procès d’intention, le vice de procédure : parce qu’en le réentendant par hasard dans les baffles plus imposants d’un célèbre magasin de seconde main, j’ai eu l’impression d’avoir affaire à un autre disque.
Sitôt sorti de ladite boutique avec, sous le coude, l’album de Silent League – on en reparlera – j’ai eu envie de relancer derechef ce “Terminal” dans mon baladeur, et bardaf ! À nouveau, ce sentiment mêlant colère et consternation : non, pas eux... Les Hjaltalín avaient-ils, comme tant d’autres depuis quelques mois, sombré à leur tout dans la seventiesation aggravée du monde indé ? Oui et non. Si l’on perçoit plus d’une influence honteuse derrière les morceaux de “Terminal”, il faut surtout les considérer comme partie intégrante d’une œuvre bigger than life, un fourre-tout collectif qui ne semble connaître aucune restriction, et surtout pas celle de l’autocensure.
Depuis le radieux “Sleepdrunk Seasons”, Hjaltalín a évolué vers quelque chose de moins primesautier, sous couvert d’un son plus ample et de compositions plus concentriques. En cela, leur parcours ne diffère pas tant de certains I’m From Barcelona, en nettement plus sérieux. Plus que jamais de mise, la richesse des orchestrations atteint ici des proportions épiques, dès les prémices de Suitcase Man et ses faux airs de western urbain. Ça se gâte pourtant avec Sweet Impressions qui, malgré un superbe déploiement symphonique digne des plus grands hymnes pop sixties, masque mal un son de guitare un peu ringard et plus proche du prog-rock commercial de la décennie suivante. Avec son côté hit d’Eurovision à la sauce ELO, Feels Like Sugar laisse d’abord le même goût doux-amer dans la bouche, puis tout devient limpide : “Terminal” est un disque qui s’écoute en cinémascope.
C’est le revers de nos vies d’hommes pressés (« vous avez que je suis... ») : ces disques qu’on achète et qu’on n’a pas le temps de découvrir en hi-fi confirment ainsi la règle des conditions d’écoute. Qui sont, ici, moins affaire de contexte que de format : Hjaltalín est tout simplement indigne de voir sa musique, où tout n’est que spatialité et horizons, compressée dans le costume trop étriqué du mp3, sous peine de lui ôter toute gravité. Pas étonnant, dès lors, de trouver des accents variétoche de luxe à un titre comme Stay By You ou d’entendre du sous-Bodies of Water (les sous-Arcade Fire) dans Hooked on Chili.
C’est alors que je me suis souvenu que les premiers ébats avec “Sleepdrunk Seasons” m’avaient procuré un identique sentiment de culpabilité mâtiné de trop peu – ou de too much – et qu’il faudrait donner à cet album-ci le temps nécessaire pour se laisser aimer. Ainsi, un Montabone finit par se révéler long – et bon – en bouche. Quant à la déliquescente et délicieuse chanson numéro 4, inutile de se demander si son introduction disloquée est née d’une improvisation, puisqu’elle s’en vante : Song from Incidental Music. Tout ceci concourt décidément à faire de “Terminal” un disque supérieur. Cependant, le groupe a réservé quelques moins bonnes surprises pour la fin.
7 Years aurait ainsi pu finir en élégante bossa nordique, mais préfère emprunter la voie des dancefloors d’autrefois et propose une disco bcbg à la Baccara ; jusque là, ça passe. En revanche, la pilule Water Poured in Wine est nettement plus difficile à avaler avec ses renvois un peu trop francs aux Scissor Sisters. On est comme qui dirait hors contexte. Vanity Music ? Un groupe qui achève son album sur pareil titre a forcément des choses à déclarer. On les trouve pourtant moins vains dans ce registre philharmonique qu’en prosélytes du parquet ciré. Inégale parce que relativement démocratique, la formation islandaise veut manger à tous les râteliers et frôle parfois l’indigestion ; mais à de rares exceptions près, et à condition d’être dégustées dans les plats ad hoc, les chansons de Hjaltalín figurent mieux au menu gourmet que dans un buffet à volonté.
La découverte d’un artiste qui nous plait s’accompagne toujours d’un sentiment de plaisir souvent teinté d’une pointe de mélancolie. Combien y en a-t-il d’autres, de pépites cachées ? On ne pourra pas répondre de façon définitive bien évidemment, on va se contenter de partager le coin à champignons qui d’ailleurs a été débusqué comme souvent par Laurent. Il aura fallu seize ans de carrière tout de même pour (...)
Quand on découvre un artiste, il est bon d’avoir quelques références. Ici, des collaborations avec Get Well Soon ou Modeselektor, une participation au formidable projet White Wine de Joe Haege et surtout la présence de P.A Hülsenbeck (remarquable artiste en solo ou avec Jüngstotter) viennent à la fois rassurer et attiser l’attente.
Avec un pied définitivement dans le jazz (cinématique Drive) et (...)
Non, la source d’artistes grecs ne s’est pas tarie, elle a même l’air de reprendre. On l’avoue, l’envie de s’enquiller un album en Grec n’est pas la proposition la plus sexy sur le papier. Si vous avez ce genre de réticence, sachez que vous pouvez l’oublier, elle disparaitra sans doute après quelques secondes.
Bazooka pratique donc sa langue, mais pour être complètement honnêtes, c’est carrément (...)
Quinze ans après Myspace, la tradition du nom de groupe étrange survit. Mais ce n’est pas le seul anachronisme ici. Le style pratiqué nous renvoie en effet plein d’années en arrière, au temps des nineties. Mais si beaucoup des formations qui font revivre ce temps-là penchent du côté alternatif de la force (The Poison Arrows, Beingmoved, Daydream Three), le duo bordelais privilégie une musique plus pop (...)