jeudi 26 août 2010, par
Esquisses d’affinités
Notre histoire, pour ainsi dire, a commencé par une rupture. Après la première blind date, on avait regardé ensemble cet arc-en-ciel et on était sortis en boîte. Le videur m’avait laissé sur le pavé sous prétexte que je ne m’appelais pas Daniel. Qu’est-ce qu’on s’était marré. On s’est redonné rendez-vous ; ce coup-là, on était plus d’un sur le coup. Sa cote de popularité avait grimpé en flèche et moi je guettais le moment de magie. Il y en avait, c’est sûr, mais quelque chose avait changé. Un goût différent dans la bouche, et cette espèce de confiance affirmée qui aurait pu facilement passer pour de l’arrogance. Pourtant, sa conversation restait aussi accessible que brillante ; le problème, c’était ses fréquentations. J’avais du mal à voir tous ces fluo-kids lui courir autour, s’extasier ainsi sur sa fraîcheur, aussi juvénile fût-elle. Quand j’y repense, j’ai toujours cette chanson des Arctic Monkeys qui joue avec ma mémoire. Je revois cette soirée ratée à l’AB. On avait peut-être trop bu... enfin... moi pas tant que ça. Mais son attitude m’a déçu, cette façon de me traiter si désinvolte, en expédiant l’échange. Tout avait été dit, mais trop vite. Peut-être qu’on était trop jeune... enfin... moi pas tant que ça. On est reparti chacun de son côté, sans prendre le temps de se dire au revoir. Son Eurostar n’attendait pas. Ça fait déjà trois ans.
J’ai appris son retour par de curieux Echoes qui avaient fait de ces retrouvailles une affaire espérée. Ou inespérée. Je savais que sa dégaine de félin space avait déjà fait jaser. Moi j’aimais plutôt bien, et j’avais vu bien pire. L’envie de lui trouver des excuses fut d’autant plus évidente lorsqu’on a, à nouveau, partagé le même espace (The Same Space). Son accoutrement dénotait une volonté récente d’aborder ses rapports avec davantage de concentration. Pourtant, la fougue était la même, et les relents de drogues qui lui lézardaient les yeux ne laissaient aucun doute sur sa consommation frénétique des derniers mois. On a continué à parler... enfin... je l’écoutais déblatérer ses délires de contrées extraterrestres (Valley of the Calm Trees, Venusia), et la vérité, c’est que j’étais happé, presque aussi captivé que lors de notre premier rendez-vous. Le ton de sa voix était lourd mais j’étais admiratif de ses certitudes.
Puis ses yeux ont viré au rouge sang ; ses obsessions intersidérales lui faisaient perdre tout sens des réalités. Le bad trip rendait ses inflexions plus agressives. C’était comme s’il y avait deux faces à son nouveau visage ; et sur la seconde, l’ardeur n’avait plus grand-chose à voir avec un débat passionnel : elle était défocalisée, grotesque. Son discours devenait inégal (Flashover) ou pire, cherchait à cacher sa banalité derrière des oxymores faciles (Future Memories). À l’évidence, le fossé entre nous n’était pas comblé. Cependant je percevais encore des esquisses d’affinités (Cypherspeed), persuadé qu’une relation comme celle-là méritait qu’on s’investît. Après tout, notre échange avait pris un départ si enthousiasmant. Pouvais-je lui pardonner d’avoir laissé ses propres divagations prendre le pas sur notre relation ? Je n’avais aucune certitude quant à la suite, mais l’idée de passer à côté de quelque chose de beau m’empêcherait pour cette fois de couper les ponts. Un jour, qui sait, quand nos longueurs d’ondes se seront accordées, quand l’âge aura fait son œuvre, nos retrouvailles auront un arrière-goût d’émoi. Et moi, je me réjouirai d’avoir su lui garder toute ma confiance.
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