dimanche 27 novembre 2011, par
Bon ben on y est presque : l’année 2011 touche tout doucement à sa fin et ça va prochainement être l’heure des bilans, presque une fin en soi quand on a envie de se nettoyer la tête et de ne retenir, en vue d’un plus lointain avenir, que ce qui aura été digne des plus vives attentions. On revient donc en vitesse sur dix albums d’électro grand public, avec beaucoup de messieurs français aux platines mais pas seulement, bref de quoi danser encore jusqu’au réveillon.
Passons sur le curieux choix stratégique, peut-être orchestré par la maison de disques, consistant à rééditer le formidable premier album de James Blake en y ajoutant un titre bonus anecdotique en plage 1, bouleversant du coup tout le tracklisting. Crétins. Parcourons plutôt, donc, l’EP “Enough Thunder” qui offre six nouvelles perles aux auditeurs transis. Dans le lot, une reprise dénudée de Joni Mitchell et un jazz vocal sans trucages démontrent le talent naturel du bonhomme, cependant que la superbe Once We All Agree constitue un addendum de premier choix à l’un des disques les plus marquants de 2011. Cerise sur le gâteau, une collaboration des plus logiques – relire à ce propos notre critique de la première édition – avec un Bon Iver très à son affaire (Fall Creek Boys Choir). Encore ! Encore !
Une techno minimaliste à l’allemande arrosée d’un soupçon de dubstep à l’anglaise, le tout enrobé d’une bonne dose de séduction à l’américaine : voilà pour la recette de cette musique machinale terriblement suave, délicatement malsaine, interprétée par une espèce de Miss Kittin qui serait incapable de commettre la moindre faute de goût. Ça ne peut s’écouter que la nuit, si possible en proie à la fièvre, encore que le disque suffise à faire grimper la température (le delirium tremens de Pretend, l’efficace Common Exchange). Parfois oppressant au meilleur sens du terme (l’instrumental Be My Guest) ou pouvant rivaliser de sensualité avec Portishead (Professional Loving, Count Backwards), “Emika” ment en intitulant un de ses morceaux FM Attention... quoiqu’un track comme 3 Hours a de quoi faire fondre les radios.
On ne peut décidément pas être déçu par The Field, dont le parcours tient vraiment du sans-faute. Au-delà de la cohérence de l’artwork – cette même pochette minimaliste où seul le titre a changé en trois albums – on retrouve un talent intact pour construire de patientes pyramides sonores où chaque élément trouve finalement sa place dans une miraculeuse harmonie de détails imbriqués. Chacune des sept longues plages cultive un univers familier, homogène dans sa singularité. La voix s’immisce sur Burned Out, résonne comme un lointain écho sur Sweet Slow Baby ; un piano vagabonde sur Then It’s White, pivote autour de lui-même, fait demi-tour, revient pour caresser les peaux qu’il n’avait que frôlées. Avec la circonvolution pour seul état d’esprit, The Field élargit le champ de nos propres visions.
Le boss du label Tigersushi n’a peut-être jamais été certifié or, mais son art sonore reste une valeur sûre. À l’instar de plusieurs de ses compatriotes – voir ci-après – il s’éloigne pourtant de l’univers plus inquiétant des débuts, au profit d’une musique qui vise l’efficacité sans manquer pour autant d’ambition. Proche d’une certaine résurgence krautrock déjà croisée chez Fujiya & Miyagi, à qui son chant désinvolte fait plus d’une fois penser, son électro quasi pop reste globalement feutrée et trouve encore, ici ou là, le chemin de nos peurs les plus profondes (l’effrayant Paranoid), quand ce n’est pas celui d’une discothèque pour déficients mentaux (In the Cave). Ailleurs, cela reste du travail d’artisan forgé dans la répétition – rien de péjoratif ici – et pas forcément à l’abri d’un tube (Forever Young).
Gaspard Augé et Xavier de Rosnay sont donc bien les nouveaux Daft Punk... Après un premier album de massacre sonore jouissif, le duo revient aux affaires avec une plaque disco décontractée du slip, comme l’avaient fait en leur temps les DJ masqués. Si le bourrin Horsepower nous maintient brièvement en territoire connu, Justice abandonne bien vite le gros son qui tache au profit d’un “Discovery” bis, adressant même des clins d’œil décomplexés à la bonne vieille french touch façon Stardust (Helix, pour n’en citer qu’un). Les emprunts au hard rock se manifestent timidement via quelques décalques rythmiques (On’n’On pompé surAC/DC, Civilization sur Led Zep), mais en dehors du plutôt irrésistible New Lands, on entend surtout ici un piètre succédané de qui-vous-savez, en plus vulgaire.
Retour gourmand pour Anthony Gonzalez, qui étale son savoir-faire atmosphérique sur 22 titres et deux disques (un seul CD aurait pu tout contenir, mais soit). Plus que jamais porté, dans la lignée du précédent “Saturdays = Youth”, sur le son ambigu des années 80, le Français pond les tubes que la décennie maudite n’a pas su enfanter (Midnight City), pastiche les Simple Minds (Reunion) et invite la très à propos Zola Jesus quand il veut sonner comme Siouxsie (Intro). Ailleurs, son chant un tantinet fatigant n’est pas sans rappeler la transe subaquatique de Panda Bear. On préférera alors régulièrement les interludes instrumentaux plus proches de son ancienne manière (Another Wave from You, Echoes of Mine) voire quelques slows très réussis (Wait, Splendor). Ambitieux mais inégal.
Ah, l’efficacité allemande ! Depuis six ans, le duo berlinois nous assène sa science sonore sans que l’on n’y trouve à redire. “Monkeytown” marque cependant un léger essoufflement. Déjà, l’absence au casting des habitués TTC signale le premier mauvais point, même si le déjanté Busdriver assure honorablement dans le rôle du rappeur décalé. D’autre part, on a droit à deux featurings de Thom Yorke pour le prix d’un, mais tant Shipwrecked que This poussent un rien trop loin le camouflage vocal. En fait, il y a plus d’une bonne idée sur le troisième effort de Modeselektor, de l’onirisme robotique de Blue Clouds à la rave sauvage d’Evil Twin, en passant pas un Green Light Go stellaire avec les nerds de PVT. On ne peut que déplorer toutefois que l’album s’encombre, en son milieu, d’un indéniable ventre mou.
En vingt ans de dance music intelligente, les deux Londoniens de Plaid ne sont jamais passés aussi près de la reconnaissance mainstream. Entendons-nous bien : il n’y a pas une once d’aguichage dans ce resplendissant “Scintilli”, mais un agencement de sons si harmonieux qu’il s’apparente presque à de l’évidence mélodique. Est-ce à dire que rien sur ce disque ne prend le contrecoup des attentes, qu’Andy Turner et Ed Hanley préfèrent le surlignage au contrepoint ? Disons que les compositions, aussi belles soient-elles dans les purs moments contemplatifs (la berceuse Craft Nine, la sublime Missing avec ses entrelacs vocaux ou la plus troublante 35 Summers), aussi ingénieusement rythmées dans les passages plus enlevés (les jouissives Sömnl ou Talk to Us), n’apportent plus grand-chose au schmilblick.
Ébranlés sur leur trône pour la première fois depuis des lustres, les rois Radiohead ont vu leurs choix artistiques remis en question par le plus grand nombre. Pourtant “The King of Limbs” reste un grand disque autiste célébrant toutes les nuances de blanc, une matière sonore qu’ils ont livrée en pâture à un casting de remixeurs balèzes. S’il est indigeste de s’enfiler d’une traite les 19 travaux, on picore avec plaisir entre les versions imaginées par Four Tet, Caribou ou encore SBTRKT (mentions spéciales). Sans surprise, c’est en général quand la version originale est plus aisément reconnaissable – le chant de Thom Yorke en particulier – que l’on se délecte le plus sûrement, comme sur la relecture de Lotus Flower par Jacques Greene ou Bloom revu par Mark Pritchard. Une intéressante parenthèse.
Impatient, qu’on était, de recevoir des nouvelles du DJ français après le succulent “Phonogénique”. Le résultat, plutôt à la hauteur, opte toute de même pour une orientation plus frontale, ouvertement séduisante à défaut de retrouver la noirceur d’autrefois. Scenario ou Monster sont ainsi de vrais tubes radio, et il faut attendre la mi-temps pour recevoir un traitement plus tempéré. Sur 436 Seconds of Happiness, Le Prince Miiaou pose son organe là où on ne l’entend plus assez, et l’apesanteur guette. Plus loin, A City Game s’égare dans une espèce d’onirisme terre-à-terre, puis c’est un véritable fossé qui sépare la disco de Good Night and Good Luck des drones menaçants qui planent sur The Black Mountain. Sans convaincre à 100%, Sayem confirme un statut d’outsider gagnant à être connu.
Il est des artistes qui mieux que d’autres nous ont donné des envies d’ailleurs, de champs musicaux inexplorés. Pour les amateurs de rock au sens large, des gens comme Underworld ont été des passeurs, comme New Order avait pu l’être pour des gens (encore) plus âgés que nous.
Cette émancipation auditive était aussi bien ancrée dans son époque, et s’il n’est pas incroyable de retrouver le (…)
Le fond et la forme. La forme et le fond. Paroles et musique. La dualité est bien connue et on la retrouve ici, bien mise en avant sur ce premier album de Stéphane Loisel. Des mélanges sont encore à tenter et celui-ci a sa personnalité propre.
Sur la forme tout d’abord, on peut dire que c’est réussi puisque des versions instrumentales pourraient fonctionner. Italo-disco, electro, le (…)
Si le hasard ou l’habitude vous guident vers ces colonnes, c’est qu’une certaine curiosité musicale vous titille. Partant de ce postulat, on se permet souvent de plonger dans des pans plus aventureux de la musique, quitte à s’y perdre parfois. Cet album parait sur Ormo records qui nous avait déjà gratifié d’œuvres comme Alan Regardin ou No Tongues, défricheurs de possibles (ref belge) (…)
Lire une étiquette est une règle de bonne pratique avant d’ingurgiter quelque chose. Le nom de l’album du Milanais Lorenzo Parisini qui officie sous le nom de Bear of Bombay ne laisse planer que peu de doute quant à son contenu et on l’avale d’un coup d’un seul en parfaite connaissance de cause.
PsychoDreamElectroGaze donc... Tout est là, avec une densité certaine de Tears From Space, qui (…)