lundi 19 mars 2012, par
Tuer le père
Les étiquettes, c’est pratique quand on veut ranger des objets, mais en musique, on perd vite en pertinence ce qu’on gagne en facilité. Le cas Fanfarlo semblait vite plié. Suiveur comme tant d’autres d’Arcade Fire, ayant livré avec Reservoir un album fort agréable qui laissait poindre quelque espoir. Trois ans ont passé, et si les géants de Montréal continuent à susciter l’envie (Of Monsters And Men), il faut reconnaitre à bien des formations une volonté de passer à autre chose, ce que la Bande Butler-Chassagne a d’ailleurs bien fait.
Et on se rend compte qu’en cherchant autre chose, devinez quoi, on trouve autre chose. Il est bon de combattre sa propre paresse intellectuelle parfois. Donc, au-delà de la ressemblance des timbres de voix, on se rend compte qu’il serait pertinent d’aller chercher plus loin, chez David Byrne par exemple, et la filiation avec les Talking Heads est assez flagrante sur Lenslife. Les moyens déployés n’ont pas vraiment changé mais leur emploi est assez différent. On quitte en effet souvent les orchestrations de folk hymnesque pour un funk blanc plus discret. Mais ils ont gardé leur souffle. Notons que cet album a été enregistré par Ben H. Allen, qui a déjà sévi avec Deerhunter ou Animal Collective.
Comme toujours un bon album doit avoir une bonne mise en bouche. Replicate sera celle-là, mise en orbite par un violon judicieux. Le violon est une composante, mais n’est pas là pour mener la valse ou appuyer une remontée. On peut risquer la comparaison entre Luna (pièce maitresse de Reservoir) et ses cuivres et l’usage de ces cuivres sur Tunguska, moins orienté l’euphorie par le son plus froid sans être plus autant désincarné
Difficile de faire des albums emballants s’ils ne visent pas au cœur directement. Pourtant, si ce n’est pas toujours excitant dans l’acception ‘rush d’adrénaline’, l’album s’impose sur la longueur, pouvant passer en force (le plus linéaire Deconstruction) ou en douceur (A Flood), articulant un morceau étrangement pop autour d’une basse (Tightrope). En osant la froideur sans diminuer l’entrain, Fanfarlo s’est engagé dans une voie plus risquée. Parce que la marge est très étroite entre une aseptisation qui tue l’émotion (on verra bientôt que c’est mon ressenti pour le nouveau Choir Of Young Believers) et une tendance pompière que je goûte peu (les espoirs déçus des Guillemots). Dans le genre, je ne vois guère qu’Efterklang au final, dans cette catégorie de groupes complètement inclassables, qui produisent des albums dont aucun titre n’est addictif à lui seul mais qui deviennent rapidement indispensables. Vous voilà donc bien avancés dans votre tentative de comprendre mon attachement…
Il faut bien le dire, le premier album montrait de belles qualités mais une ombre tutélaire bien encombrante planait sur eux. Il semble maintenant qu’ils aient décidé de tuer le père, et cette liberté gagnée prend forme sur une des meilleures surprises de ce début d’année.
‘Si ça va trop vite ou trop fort, c’est que vous êtes trop vieux.’
C’est ce que veut l’adage et l’Italien Enzo Pepi a décidé de le prendre à contrepied, intitulant son album d’une réflexion souvent entendue. Mais on se doute qu’on lui fasse encore la remarque. Surtout que de fureur il n’est finalement pas question ici. Ce vétéran italien de la scène rock/noise utilise la distorsion, certes, (…)
On avait appréhendé l’univers de Lazy Day à travers un morceau à la fois rêveur et tendu. Concrete dégage un charme qui nous rappelle notre attachement à Broken Social Scene et on le retrouve ici mais ce n’est qu’une des nombreuses facettes développées par Tilly Scantlebury (de Londres). Ce qui déconcerte, c’est précisément de ne pas être plus déconcertés quand on fait le détail qui balaie (…)
Il semble qu’Andrew Bird puisse disputer à Rufus Wainwright le prix de la dispersion des envies musicales mais on peut aussi dire avec un peu de certitude que le premier l’emporte dans l’intérêt de ses projets parallèles. Après avoir exploré l’ambient in situ avec ses Echolocation et sa relectured’Inside Problems et attaqué des standards de jazz, le voici qu’il s’allie à Madison Cunningham (…)
La présentation du second album de Saint Sadrill name-droppe James Blake, Mark Hollis, Scott Walker et St Vincent. Ambitieux évidemment, contre-productif peut-être mais on ne peut nier une certaine pertinence là-derrière. Ce qu’on peut en déduire aussi, c’est que si ces climats amples et les surprises font partie de vos plaisirs d’écoute et si aucun des exemples ne vous rebute, vous prendrez (…)