Accueil > Critiques > 2012

Mono - For My Parents

jeudi 13 septembre 2012, par Marc

Croustillon


J’ai déjà eu cette année l’occasion d’ironiser sur le post-rock, sur un certain immobilisme par rapport à certains courants contemporains qui apparaissent comme plus excitants (et peut-être plus éphémères aussi). Pourtant, l’annonce de la sortie d’un album de Mono a suscité plus qu’une curiosité, une vraie envie. Dans ce cas, on oublie les modes, voire même une certaine idée du bon goût, pour s’abandonner dans ce lyrisme certes exagéré, mais qui impose plus de respect que de ricanements. L’intégrité et la sincérité réussissent parfois ce tour de force.

Grandiloquent est sans doute un mot encore faible pour la formation nippone, et comme la musique instrumentale est affaire d’évocations et il serait sans doute tentant de comparer le quatuor japonais à certaines estampes d’Hiroshige, pour la menace toujours policée, pour cette écume qui va engloutir mais n’éclabousse pas, pour ce tsunami toujours propre sur lui. On pourrait aussi évoquer des montagnes russes. Pourtant, dans le cas qui nous occupe, l’analogie avec la nourriture des foires me semble plus pertinente. Notamment parce que les contrastes sont moins forts que par le passé. Hymns To The Immortal Wind m’avait plus séduit, parce que les moments plus intenses l’étaient vraiment, et prenaient plus de relief. Et puis parce qu’à ce degré de romantisme exacerbé, on peut parler de plaisir un peu coupable, tout comme ces croustillons qui ne constituent pas le fond de notre alimentation.

On le voit, difficile d’aborder cette musique autrement que par la bande. Parce que les moyens, c’est une l’entente cordiale des cordes et des guitares, mais à des lieues de l’aridité des géniaux Godspeed You ! Black Emperor. Quand on est bien disposés, on attend ces figures imposées, on les réclame même. Nostagia ou Unseen Harbour les fournissent, donc on est contents. Leur sens de la mélodie est indéniable, et dès le départ, on embarque dans un voyage d’une jolie mélancolie.

Parfois il faut remettre ses sarcasmes au vestiaire, changer de vue, arrêter de s’imposer de la nouveauté, et succomber à ce qu’on peut aimer. Ce simple conseil n’est pas aussi évident qu’il n’en a l’air. En d’autres termes, tout le monde a le droit de ne pas culpabiliser sur ses plaisirs coupables. Si le beignet cuit à l’eau avec de la farine de son est votre truc, passez votre chemin, mais si vous aimez de temps en temps vous sustenter sur une foire tout simplement parce que c’est bon, le très imposant daughnut Mono est à écouter.

http://monoishere.com/

    Article Ecrit par Marc

Répondre à cet article

  • The Aquatic Museum - The Aquatic Museum

    On a vérifié pour vous, le Luxembourg n’a pas d’accès à la mer. Pourtant, le collectif articulé autour de Claire Parsons évoque l’élément liquide. On pense à Selfless Orchestra qui mêlait post-rock et défense de la Grande Barrière de Corail. De post-rock il est aussi question ici, même si quand ils pratiquent le genre ils le mâtinent d’une pincée de big band. Ça donne Trash Tub, le genre de morceau plus (...)

  • Bärlin - State of Fear

    Cet imposant album d’un trio lillois nous semble familier sans que ce ne soit exactement identique à quoi que ce soit. Si on tente de retrouver son chemin, on est très vite tentés de s’y perdre pour mieux s’y fondre. Le chant très expressif dès Deer Flight, un peu comme si Patrick Wolf s’était mis au post-punk poisseux et éructait (aboyait même sur Revenge). On y secoue lentement la tête pendant que la (...)

  • you.Guru - UNtouchable

    Si on ne reçoit qu’avec parcimonie des nouvelles musicales de Pologne, force est de constater que celles qui nous parviennent sont toujours au minimum dignes d’intérêt (The Bullseyes, Izzy and the Black Trees) et on ajoute You.Guru a la liste.
    Ce que propose le trio n’est vraiment du post-rock, mais un rock instrumental enlevé, pulsé. Un genre de math-rock qui serait allé se promener ou du Holy Fuck (...)

  • Spelterini - Paréidolie

    Cet album du quatuor (dont deux membres de Chausse Trappe et de Papier Tigre) nommé d’après une funambule italienne est en fait un log morceau de 33 minutes. Cette lenteur, cette longueur sont le morceau. Il faut savoir se laisser happer, garder un peu de concentration pour que ça percole comme il faut. On entendra un long son qui monte pendant plusieurs minutes avant qu’une grosse caisse ne (...)