Accueil > Critiques > 2014

Fujiya & Miyagi - Artificial Sweeteners

lundi 26 mai 2014, par marc


Un jour elle est arrivée dans la cour de récré. Vous la connaissiez, vous n’y aviez plus prêté attention depuis le jour où on vous l’avait présenté. Mais aujourd’hui, son entrée était un peu différente. Rien de décelable, pourtant, presque malgré vous, vous avez tourné la tête. Certes, vous vous rappelez que vous aviez déjà connu une mue pareille. D’autres filles étaient devenues tellement populaires que leur aura débordait de l’enceinte de l’école, vous aviez dû rencontrer des personnes l’admirant pour de bien mauvaises raisons.

Vous m’avez vu venir avec mes gros sabots, cet album du groupe anglais Fujiya & Miyagi est une bonne surprise qui pourtant ne rompt pas brutalement la continuité de leur discographie. Impossible de ne pas penser à Caribou, qui a tellement réussi sa mue que visiblement personne ne se souvient de ce qu’ils faisaient avant (et qui était pourtant formidable). C’est donc un peu pareil mais un peu mieux, ce que du reste j’avais ressenti à l’époque de Ventriloquizzing.

Le chant est toujours aussi étouffé et répétitif. Mais ça fait partie de leur charme et maintenant que la musique a évolué, ce contraste est encore plus marqué et marquant. Leur kraut cotonneux était séduisant, certes, hypnotique même parfois, mais on a attendu un peu avant de les suivre plus inconditionnellement. Ils n’ont d’ailleurs pas encore renoncé à leurs tentations krautrock sur Rayleigh Scattering et on peut les en remercier.

Etape par étape, palier par palier, Fujiya et Miyagi grandit et agrandit sa palette. Sur Flaws, il y a tout, quelques notes de guitares entêtantes et puis une remontée qu’on n’attendait même pas. Plus inattendue est la présence de l’électronique, voire même de sons carrément funk eighties sur Acid To My Alkaline. Tetrahydrofolic Acid est en tout cas dans une drôle de transe. Quant à la combinaison de basse et de guitare acide de Daggers, elle évoque rien moins que Wire, groupe qu’on ne peut rapprocher en aucun cas de la moindre velléité de cocooning. Leur science du son s’est affinée et on le sent sur Vagaries Of Sound, qui repart en mode presque purement électronique. Ou alors dans la seconde partie plus dense du joli de Little Stabs at Happiness.

Alors, serait-ce le Swim de Fujiya & Miyagi ? Si on ne peut pas encore préjuger du succès éventuel de cet album, il faut admettre que par petites touches, ils arrivent à secouer leur (fort plaisante disons-le) torpeur. Il fallait un gros album avec de gros morceaux pour mettre la théorie en pratique, et on peut dire qu’on le tient ici.

http://www.fujiya-miyagi.co.uk/

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • Mildfire - Kids In Traffic

    Pourquoi les genres disparaissent-ils ? Ces symphonies de poche tellement présentes et attachantes ont un peu perdu de leur lustre et c’est un peu dommage. Parmi ces orfèvres, citons The Annuals, Choir of Young Believers, Musée Mécanique, Fanfarlo ou Efterklang parce qu’il est toujours bon de se rappeler de bons souvenirs. Dans cette veine, on avait spécialement apprécié Einar Stray et on ne (...)

  • The Smile - Wall of Eyes

    Même en 2042 et après avoir sorti 13 albums réussis, The Smile restera ’le groupe des deux types de Radiohead’. C’est comme ça, le groupe d’Oxford est trop ancré dans la culture pop pour passer au second plan de quoi que ce soit. Mais cette encombrante et inévitable figure tutélaire ne doit pas oblitérer les qualités indéniables de The Smile. Les deux protagonistes, flanqués du batteur Tom Skinner au (...)

  • Maxwell Farrington & Le Superhomard - Please, Wait...

    On ne peut pas dire que la paire formée par Maxwell Farrington et Le Superhomard (le producteur français Christophe Vaillant) se repose sur les lauriers d’un premier album remarqué. Après un EP il y a deux ans et une tournée intense, voici déjà le second album en peu de temps sur le toujours excellent label Talitres.
    Australien établi à Blinic en Bretagne, Maxwell Farrington propose sa belle voix de (...)

  • Heeka - The Haunted Lemon

    Il faut se méfier des avis trop rapides, des débuts d’albums trompeurs. Ce sur les morceaux initiaux du premier album de l’artiste flamande (née Hanne Hanegraef) installée dans le sud de la France doivent beaucoup aux voix, dédoublées. Quelque part entre Camille et Agnes Obel, ces morceaux intrigants et séduisants à la fois ne représentent cependant qu’une facette d’Heeka.
    Une fois mis en confiance, (...)