lundi 18 janvier 2016, par
Il est fou ou il fait le fou ? C’est le titre d’un album de Germain et Nous, par Janin et Honorez. Il faut en effet une question belge pour Arno. Parce que s’il existait un équivalent national au classement de l’Unesco au patrimoine immatériel de l’humanité, il serait sans doute le premier à en bénéficier. On avoue aussi que la question liminaire, on se l’est déjà posée, et ce treizième album solo ne vient pas clarifier la situation.
On a donc un peu abdiqué, surtout que les deux tendances faussement opposées de ses albums sont toujours là après quarante ans de carrière, plus marquées que jamais. On peut donc séparer les chansons par leur langue. C’est une distinction qui est moins arbitraire qu’il n’y paraît puisqu’il produit dans ces deux cas des choses bien différentes. Ce qu’en racontait Laurent il y a presque six ans reste donc bien pertinent.
D’un côté donc, on a donc du blues anglophone, bien servi par une voix qui transpire l’expérience, la maturité et une certaine ironie. On retrouve donc avec plaisir cette veine sur le premier morceau I’m Just an Old Motherfucker, Never Trouble ou (Better to dance like a goose/Than to swim in the booze). On a toujours l’impresssion de retrouver un Tom Waits du plat pays et c’est toujours bien réjouissant.
L’autre versant est aussi connu et a assuré sa notoriété pour le grand public qui avait moins accroché le wagon turbulent et jubilatoire de TC Matic. L’album A La Française reste un de ses sommets et il n’abandonne pas le créneau et il a bien raison. Parce qu’ils sont rares ceux qui se frottent au français sans que ce soit leur langue maternelle, et a toujours trouvé un contrepoint, quelques surgissements pas piqués des hannetons. Il n’y en a pas énormément ici, même si on relève tout de même Je n’oublierai jamais/quand ta langue est rentrée dans ma bouche/comme une nouille sautée (Oublie Qui Je Suis).
Mais les morceaux en français sont aussi des terrains de jeu comme le prouve la naïveté un peu forcée de Je Veux Vivre ou La Chanson Absurde qui peut paraître artificielle. Ce qui fait le sel d’Arno dans ces cas-là, c’est la surprise, les tournures inattendues de morceaux emblématiques comme Putain Putain ou Mon Sissoyen. On dirait ici qu’il s’est imposé du décalage, et ça perd en force naturelle. Mais fort heureusement, il clôture cet album par le très beau Santé, montrant qu’il peut toujours être poignant.
Bluesemen crédible et amuseur public, ce sont les deux pôles entre lesquels Arno a toujours oscillé et c’est encore le cas ici. Les deux façons sont encore une fois clairement distinctes mais pour celui qui veut voir de temps à autres où en est Arno Hijntens, les nouvelles sont bonnes.
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