mercredi 25 mai 2016, par
Il ne faut pas prendre la singularité de Jean-Louis Murat pour de la solitude. S’il sort depuis toujours des albums très personnels, ce sont aussi ses collaborations qui façonnent le son de toutes ses sorties. Après un long Babel qui signait une collaboration très fructueuse avec le Delano Orchestra, il signe son vingtième album en recrutant des musiciens au passé tourné vers le classique et l’improvisation jazz et ayant quelques belles références. Le claviériste Gael Rakotondrabe ayant déjà joué avec Antony and the Johnsons ou Pierre Lapointe et le bassiste James Thomas a côtoyé Ray Lamontagne. Citons aussi le retour de Morgane Imbeaud (Cocoon) aux chœurs.
Le résultat est donc bien moins champêtre que sur Toboggan et moins direct que sur Babel. Rassurez-vous, ce n’est pas trop lounge non plus. L’équilibre est donc très vite établi, permettant quelques moments à la coolitude bien réussie (Tous Mourus).
Vos lettres latines vous ont enseigné que Morituri désigne ceux qui vont mourir (et qui saluent César au passage). Outre l’universalité de notre condition de mortel, cette allusion est ici plus spécifique au monde paysan qui disparaît. Ce n’est pas neuf chez lui, ce thème avait déjà été abordé dans Vendre les Prés mais il est encore plus présent ici et il s’incarne dans d’inquiétants gimmicks (chialer dans la cuisine sur la Pharmacienne d’Yvetôt), dans une fausse trivialité (Tous Mourus), du bon vieux WTF des familles (French Lynx) ou un faux ton enjoué (Interroge La Jument).
Même si on a renoncé depuis longtemps à se lancer dans une exégèse poussée de ses textes, ils s’imposent d’eux-mêmes par leurs fulgurances et l’aplomb avec lequel il les livre. C’est sans doute pour ça que quelques bribes plus figuratives prennent une lumière particulière. Même s’il a été écrit le texte d’Interroge La Jument longtemps avant les attentats de Paris, on se rend compte que le mot ‘terrasse’ ne résonne plus de la même manière.
Sur la terrasse sous les cimes/Où tout bien pesé on t’assassine
Dans cette veine presque directe, le magnifique Le Cafard est spécialement marquant. On savait qu’il pouvait se surpasser dans le hors-format (Nu Dans La Crevasse, quelqu’un ?) et il livre ici un texte d’une noirceur limpide qui s’impose tout de suite.
J’ai eu le cafard/C’est quoi le cafard/Difficile à dire/C’est comme un buvard/Qui te boit la joie/Te prépare au pire
J’ai eu le cafard/Soupirer les choses/Mais sans les changer
Autre bonne habitude, sa musique respire la facilité et son sens mélodique reste étourdissant. C’est flagrant sur les morceaux à la structure plus simple comme Le Chant du Coucou, Morituri ou la La Chanson du Cavalier qui établit un très beau climat alangui dans sa partie finale. C’est aussi le cas de Franckie. On n’installe pas une ambiance pareille en trois secondes, il est donc logique que certains morceaux prennent leurs aises.
Le grand Babel était trop long pour frapper juste à tous les coups, celui-ci propose autre chose, une forme plus languide et détendue qui convient bien au spleen dispensé à forte dose ici. Au final, Morituri est un de ses bons albums récents, montrant que sa discographie reste très vivante.
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