Accueil > Critiques > 2016

Moderat - Live

mardi 13 décembre 2016, par marc


Ce n’est pas parce que certains groupes ne se voient pas critiqués qu’ils ne sont pas sous le radar. Après trois albums, Moderat s’est en tous cas imposé comme une valeur sûre, ce que vient confirmer ce live. Si j’ai déjà assisté à des prestations de Modeselektor (imparable en festival) ou Apparat, avec pour ce dernier le souvenir d’un live assez fantastique au Beursschouwburg de Bruxelles, je n’ai pas encore eu l’occasion de voir le trio sur scène. Cette fructueuse collaboration avait d’ailleurs commencé par une relative frustration. Parce qu’au départ, la conjonction de ces deux équipes (Sasha Ring d’un côté, Gernot Bronsert et Sebastian Szary de l’autre), c’était ce morceau fou, sans titre, inconnu célèbre, qui pouvait mettre la tête à l’envers à n’importe qui.

Une fois traduit en morceau, il a simplement servi de gimmick dans une version dégradée pour Seamonkey. La cohérence de l’album et de la discographie qui a suivi y était sans doute gagnante, mais ce coup d’éclat me manque encore pour ce groupe.

Enregistrer ce concert à la maison, au Velodrom de Berlin, peut être vu comme une volonté de remettre la capitale allemande au centre de la carte electro. L’exercice du live peut être rigoureusement inutile sauf pour fixer un souvenir ou garnir le tiroir-caisse entre deux albums studio (la méthode éprouvée des artistes français établis). Dans le cas qui nous occupe, il a une double fonction, celle d’établir le succès inattendu de la collaboration et de permettre aux distraits de prendre le train en marche. Parce que ce train-là ne doit pas se rater au final. Leurs tournées sont assez surprenantes, touchant un public bien plus large qu’on ne l’aurait pensé et bien honnêtement, ça fait plaisir à l’heure où les grand-messes electro font surtout dans le bas de plafond.

Un des premiers sujets d’étonnement est de voir que le travail commun du trio est pérenne. Eux qui ont empilé les collaborations (dont l’excellent Orchestra of Bubbles avec Ellen Allien) ont visiblement décidé de se consacrer pleinement à celle-ci et c’est sans doute un bon choix. Si le dernier album d’Apparat faisait la part belles aux invités vocaux, dont la moindre n’était pas Soap&skin, c’est bien Sasha Ring qui chante exclusivement. Certes, ce n’est pas un vocaliste inoubliable mais il se prête plutôt bien à l’exercice.

Ce concert commence sur un mode presque mineur, Ghostmother n’ayant pas été identifié comme le morceau le plus emballant de III, leur album studio sorti plus tôt dans l’année. On monte logiquement d’un étage avec la brillante intro d’A New Error, qui revient et s’enroule de façon lancinante et crée presque malgré lui des décharges d’euphorie. C’est évidemment leur art consommé du live electro (tendance minimal pour le coup), du set qui se construit patiemment qui est clairement démontré ici. On savait que c’étaient plus que des requins de studio de toute façon.

Ce n’est pas 101 de Depeche Mode évidemment mais on entend tout de même le public reprendre le refrain de Bad Kingdom. Un live doit compter ses moments d’exultation et on le retrouve aussi du côté de la version présentée de Reminder, dans la grosse décharge mélancolique de Rusty Nails ou Intruder qui reste un des tout bons moments de III. Ils pensent même à enchainer Eating Hooks à un de ses remixes, rappelant qu’ils sont friands de l’exercice.

On pense au crossover réussi de Massive Attack mais qui aurait le son de cette décennie-ci et s’adresserait à un public plus jeune et moins nostalgique. Et si contre toute attente, c’était Moderat qui avait trouvé la bonne formule, celle qui atteint l’équilibre entre accessibilité et aventure pour le plus grand nombre ? Certes, ce n’est pas demain qu’ils déplaceront plus de foule que David Guetta et consorts mais dans le marasme EDM qui nous entoure, la réussite de ce groupe, validée par ce live électrique fait chaud au cœur.

http://moderat.fm/

Oui, cette video contient aussi Running qui ne figure pas sur l’album

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • Dark Minimal Project – Remixes

    On vous avait déjà dit tout le bien qu’on pensait du second album de Dark Minimal Project, Ghost of Modern Times. On avait décelé un cousinage certain avec Depeche Mode et c’était loin de nous déplaire. Et la ressemblance se prolonge avec ces remixes, le groupe anglais étant très friand de l’exercice. Sur la pochette, les deux protagonistes Guillaume VDR et Ange Vesper semblent avoir pris cher mais (...)

  • Tinlicker – Cold Enough For snow

    Chacun va mettre sa ligne rouge sur cet album du duo de producteurs bataves Micha Heyboer and Jordi van Achthoven. C’est forcé tant cet album oscille entre trop et beaucoup trop, délicatesse et évanescence. Mais il est aussi impossible de ne pas trouver son compte non plus. Ce continuum qui va de la pop dansante et cotonneuse à du matos pour une rave à 4 heures du matin est en tout cas assez (...)

  • Jonas Albrecht - Schrei Mich Nicht So An Ich Bin In Trance Baby

    Si ce n’est pas trop visible pour le lecteur, certains distributeurs participent beaucoup à la ligne éditoriale. Parmi eux, Five Roses tient la pole position. Si l’éclectisme est remarquable, une des constantes est la présence d’artistes qui manipulent la percussion comme matière première. Dans un passé récent, on a eu le dernier Peter Kernel, la claque de Parquet et tous les projets d’Anthony Laguerre (...)

  • Parquet – Sparkles & Mud

    Alors que la technologie tente depuis très longtemps d’avoir des équivalents numériques à tous les instruments qui existent, la démarche de certaines formations va dans le sens opposé. Certes, c’est parfois anecdotique quand certains se présentent comme fanfare techno (Meute) mais dans le cas qui nous occupe, la force de frappe est indéniable.
    Parquet a été fondé en 2014 par Sébastien Brun qui a déjà (...)