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Perfume Genius - No Shape

lundi 5 juin 2017, par marc


Rarement comme dans le cas de Mike Hadreas on a suivi un album éclos dans un registre intimiste pour prendre possession du monde. Il est sans doute facile de mettre en parallèle ses évolutions artistique et personnelle. La vérité, c’est qu’on n’en sait trop rien et que le résultat nous est livré ici avec un quatrième album qui se place dans la lignée des trois autres avec une logique implacable.

On avait senti que l’évolution de Mike Hadreas n’était pas un feu de paille, et ce quatrième album le confirme de belle façon. Notre attachement est tel qu’on lui pardonne même d’avoir collaboré avec Christine and The Queens.

Dès Otherside, on entend tout de suite un piano intime, une voix personnelle et seule. La différence, ce sont ces surgissements intenses. Comme s’il semblait soucieux d’assurer une continuité, une transition, et de montrer sur un seul morceau l’amplitude de ses envies. Il bascule plus franchement C’est plus fort encore sur Slip Away qui finalement est plus convaincant parce que plus frontalement assumé. On va voir du côté d’un Xiu Xiu, remplaçant la charge anxiogène par de la délicatesse (Wreath), ce qui en oblitère un peu l’impact il faut l’avouer.

On n’est cependant pas ici au niveau de ce que nous a proposé AHNONIl’an dernier. Le rapprochement est pourtant bien obligatoire, ce que proposait l’ancien Antony étant du registre intime (même si très ample) avant d’évoluer vers plus de modernité pour un résultat autrement plus percutant. Il ne faut donc pas chercher par-là sa singularité, et, partant, son intérêt. On le trouvera plutôt dans l’intrigant début de cordes sur Choir, Morceau plus hanté qu’il n’y parait. Ou alors du côté de Die 4 You, chose évanescente et cinématique, relecture queer de Portishead, James Blake en apesanteur. On notera aussi la belle contribution de Weyes Blood sur Sides. On la verrait bien entre Chelsea Wolfe et Anna Von Hausswolf. En bonne compagnie donc

La mutation de Perfume Genius n’en est plus vraiment une maintenant. Album après album, il incorpore plus de composantes à son mélange purement intime à l’origine. On gagne au passage une vraie personnalité très en prise avec le son de son époque mais on s’accroche en vain à l’émotion des débuts. Ce bel objet hybride s’impose facilement comme un des repères de l’époque mais n’est pas ce qu’on entendra de plus excitant cette année. Peut-être que tout simplement l’équilibre est difficile à trouver et c’est sans doute là qu’il faudra chercher des raisons de s’enflammer dans le futur, que la marge de progression est la plus manifeste. On reste à l’écoute de toute façon.

    Article Ecrit par marc

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