mardi 3 avril 2018, par
Même ceux qu’on croit connaitre le mieux peuvent nous réserver quelques petites surprises. Par exemple, sur le premier morceau de leur dernier album, le tellement groupe sympathique de Portland, Oregon nous gratifie de quelques synthétiseurs. On ne voit peut-être pas immédiatement leur apport et on découvre que c’est John Congleton qui est à la production. Cet incontournable maître du son a enluminé bien des bonnes choses récemment (liste complète ici) mais c’est avec Xiu Xiu qu’on l’avait découvert.
On retrouve aussi ces synthés aussi sur Cutting Stone mais leur écriture n’a pas suivi la même évolution. C’est heureux, certes, mais on se surprend à penser que ce ne sont pas les atours les plus pertinents pour le groupe. Chipotages, je vous l’accorde tant le morceau est fidèle à leur genre. Et c’est ça le plus important, on sait qu’on peut compter sur un songwriting de très haut niveau que le son gonflé ne met pas sous l’éteignoir.
Ce traitement, quand il est plus léger, convient bien à des morceaux plus up-tempo comme Your Ghost ou Starwatcher. La pulsation d’un We All Die Young étant presque glam et toujours maîtrisée.
Ils reviennent à une forme plus classique pour eux, limite country, avec un son certes gonflé (Sucker’s Prayer) mais qu’ils ont voulu étrange. Le résultat est en effet plus éloigné de leur veine plus traditionnelle entendue sur The King Is Dead et Long Live The King. Tripping Along est acoustique et ce ne sont pas les discrètes nappes qui viennent le dénaturer. L’espace est donc libre pour l’interprétation toujours intense de Colin Melloy.
Les textes restent simples d’aspect mais toujours ciselés et Everything Is Awful ou Severed peuvent être vus comme une charge anti-Trump. Ce qui est étrange parce qu’on pense souvent que les histoires des Decemberists font partie de la tradition orale et narrative. Ils reviennent d’ailleurs à cette tendance sur un Rusalka plus épique et long. On est forcément contents de les voir revenir à leur domaine de prédilection, à savoir un sens de l’ampleur et de la rupture (la sensation qu’on enchaîne plusieurs morceaux). Souvent même, ils ont utilisé toute la longueur d’un album pour déployer des idées pareilles pour le meilleur (The Crane Wife) ou le pire (The Hazards of Love).
Les synthés sont plutôt concentrés en début d’album, comme pour montrer que ce n’est qu’un essai. Après 17 ans d’existence, un groupe se doit d’essayer des choses, c’est certain et malgré les apparences, la révolution copernicienne n’est donc pas en marche chez la bande de Colin Melloy. L’évolution du son de clavier étant relativement anecdotique puisque le groupe continue à miser sur des qualités d’écriture et une interprétation jamais prise en défaut.
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