mercredi 27 mai 2020, par
L’éclosion de Mike Hadreas, on la suit depuis le tout début, et si elle s’est faite par étapes successives, la vision globale est assez spectaculaire. On l’avait quitté avec No Shape en 2017 qui avait plu, montré que son univers était en expansion mais que son processus n’était pas encore stabilisé, qu’il y avait encore une marge de progression. La phase de polissage du style est en cours mais le ton d’un album à l’autre reste sensiblement différent, montrant de la maturité. Il n’a que 28 ans après tout.
On commence par un morceau langoureux où son émotion percole mais on se dit qu’il ne faudrait pas grand’chose pour que le kitsch reprenne le dessus. Mais ce n’est qu’un morceau parmi d’autres, pas même une indication sur ce qui va suivre. On le connaît maintenant, il n’est pas homme à se cantonner à une seule direction. Cette tentation s’estompe en effet dès Describe, la densité reprend ses droits et son interprétation toujours sensible établit comme toujours un beau contrepoint. Mais ici, il apaise le morceau dans une queue presque ambient alors qu’il aurait sans doute ajouté un élément de surprise bruitiste à ce genre de morceau. Il évolue encore.
La sortie de chrysalide ne s’exprime donc pas par une flamboyance de tous les instants, remplacée par un éclectisme qui lui convient bien et montre que son registre est vaste et s’étend encore. Il assume ainsi pleinement une lumière, un côté direct et presque pop sur Without You. La balade en voix de tête sur Jason est limpide comme tout.
Et finalement, ce sont les morceaux plus lents, qui n’ont cependant pas la fragilité des débuts qui sont le moins marquants (Moonbends, Borrowed Lights). Sans doute qu’on est trop exigeants, que la beauté manifeste ne suffit plus. Parce que oui, ils sont bien beaux ces morceaux. Mais on est plus emballés encore quand il est moins sombre et bruitiste sur Set My Heart On Fire Immediately, quand il livre avec Just a Touch le genre de torch-song dont Radiohead a pu nous gratifier.
On le suit sans réserve aussi sur la distorsion gratifiante du début de Nothing at All qui est sans doute le morceau qui encapsule le mieux ces tendances et leur convergence entre un chant sensible et émouvant, une vraie solidité qui ne la ramène pas et une facilité mélodique qui rend le tout immédiatement accessible. Et ça repart, ça pousse là où ça fait du bien de se faire pousser.
Sorti du contexte de l’album, un morceau comme On The Floor n’est pas une tuerie mais ici il trouve une place plus qu’intéressante. Riche, ensoleillé (un soleil toujours voilé de mélancolie s’entend), il définit une nouvelle frontière et rend l’écoute intégrale de l’album encore plus intéressante.
Des débuts fragiles et touchants, une suite qui le voit sortir spectaculairement de sa coquille, et puis une phase de maturation à petites touches sans jamais frôler la répétition ou la facilité, le talent de Mike Hageas s’affirme toujours. On avait d’emblée décelé du talent chez Perfume Genius, mais la façon dont il l’exprime est surprenante et dépasse toutes les espérances. Il a en effet très tôt pris la tangente sans se renier, essayé et réussi à devenir plus flamboyant et aventureux pour maintenant assumer une forme plus directe que son talent mélodique permet aussi. La constance et l’éclectisme proposé ici ne peut que forcer l’admiration.
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