jeudi 11 septembre 2008, par
La mélancolie des fanfares
Il va falloir que j’arrête cette mauvaise habitude de débouler en retard dans des discographies essentielles. Enfin, à moins d’étirer mes journées ou revenir dans le passé, je ne vois pas trop comment. Toujours est-il que je connaissais de loin Calexico, plus par la réputation de leur mélange de folk-rock sombre et d’éléments plus mariachi. Pour leur fructueuse collaboration au tout bon Mustango de Jean-Louis Murat et avec Iron and Wine aussi. Alors, oui, il y a de tout là-dedans. Et bon, je m’y suis senti chez moi avec une prévisible facilité.
Le mélange prend dès Victor Jara’s Hands (trait d’union entre le Chili et les Alpes de Haute-Provence pour la minorité qui se reconnaitra dans cette très private joke). Mid-tempo langoureux, riche et prenan, aAvec mise en place de tous les ingrédients. Steel guitar, voix hispanisantes. Et puis les morceaux s’enchainement sans faiblesse (Two Silver Trees, Writer’s Minor Holiday qui fait son petit dEUS), entrecoupés d’intermèdes instrumentaux, qui, pour classiques qu’ils soient, n’en sont pas moins assez convaincants comme El Gatillo ou les violons de Falling from Sleeves. Il n’y a pas, comme chez nombre de leurs coreligionnaires (Tindersticks, The National, Devastations) une voix grave et ténébreuse. Ce n’est pas là-dedans qu’il faudra aller chercher. Elle est plus effacée, colle parfaitement à la langueur distillée par cet album.
Cerise sur le déjà fort riche gâteau, il y a des moments où c’est carrément prenant. Man Made Lake par exemple est un de ces moments où chaque détail, le moindre son de cloche, tout est à sa place. Il en résulte une réussite tout en fureur rentrée, en distorsion en retrait, sans pathos, avec subtilité, distance et noirceur, compacité et ampleur. Dans la foulée, Inspiracion sonne comme assez kitsch. La musique des pays situés au sud des Etats-Unis m’a toujours laissé perplexe de toute façon. C’est leur plus grand écart mais ça permet à cet album de ne jamais être plombant. Je préfère de loin quand l’insertion des cuivres est plus discrète. Comme sur House of Valparaiso (dont le gimmick de trompette est le même que celui de la montée Go Away des Guillemots) par exemple.
On pourra aussi moins aimer la slide guitar (Slowness), les harmonies vocales avec (jolie d’ailleurs) voix féminine. C’est plus classique dans le genre Americana et sonne comme déjà entendu, même si on ne tombe jamais dans la jérémiade. De toute façon c’est l’intensité qui décide, le talent qui fait le reste, l’implication et la sensibilité de l’auditeur aussi. Ce qui fait qu’ils emportent le morceau même s’il arrive lors d’une écoute intégrale ou l’autre de se perdre en route le long de ces quinze titres.
Une enfilade d’impeccables chansons ça fait un impeccable album. Je ne vois pas comment le dire autrement. C’est du désespoir chic, de la mélancolie de bon aloi. Et ça sent bon la poussière des routes, le talent à l’état brut, les gargotes écrasées de soleil, les piments qui piquent, les morceaux qui n’ont besoin que d’un sifflement pour être bons, les cuivres classieux, la fête triste, la nostalgie légère, les albums qu’on va garder, ces amis qu’on allait rencontrer, les concerts qu’on ira voir (avecGet Well Soon youpi). Oui, c’est un peu tout ça Carried to Dust. Et c’est pour ça que c’est bon.
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