mardi 11 mai 2010, par
L’album d’après
Il y a les albums qui débarquent de nulle part, puis il y a ceux qu’on attend, enfin les albums qu’on attend fiévreusement. Il va de soi que le successeur de ce qui était mon album préféré de 2007 émarge à cette rare catégorie. Dans ces cas-là souvent, je n’écoute que distraitement les morceaux semés ça et là. Pourtant Bloodbuzz Ohio m’avait bien plu, même s’il n’égalait pas le Fake Empire qui annonçait la tornade de l’album précédent. Si j’avoue essayer d’éviter le côté ‘fan de’ pour une critique et que je n’ai jamais retrouvé le plaisir de mon premier concert d’eux au Botanique (il y a cinq ans déjà…), il faut bien dire que l’appréhension n’est pas la même que pour un autre groupe.
Le second morceau commence et on est soulagés. Parce que le premier est passé tout seul, sans difficulté, sans recul, familiers qu’on est déjà. On va pouvoir encore parler de ce groupe en bien. Le droit de se conforter dans ses propres préjugés, voilà la douce satisfaction que nous procure High Violet. On sait que sa valeur ne dépendra pas des modes, de l’humeur de l’auditeur ou des conditions d’écoute. On retrouve cette densité, ces progressions d’accords simples mais imparables. A trois ans d’intervalle, ils ont gardé le même élan. Leur tri a été fait il y a un petit temps. On peut sans doute regretter l’émotion incroyable qui exsude d’un Cherry Tree plus ‘organique’ ou la disparition de morceaux qui osaient être lents comme Daughters Of The Soho Riots mais on les suit dans leur fausse immobilité.
Avec des mêmes instruments, une gamme somme toute réduite pour le rock, certains groupes arrivent à créer de l’intensité et d’autres pas. Imputons ça au caractère impondérable du talent. Prenons note de l’émotion qui se dégage des simples procédés d’Afraid Of Everything. Certes le gimmick de guitare est absolument imparable, mais je n’arrive pas à isoler ce qui fait de ce morceau un excellent morceau.
Bloodbuzz Ohio qui annonçait cet album n’aurait certainement pas déparé Boxers, avec sa batterie qui martèle, son chorus intense, sa reprise prévisible. Mais prévisible ne veut pas dire ennuyeux, parce qu’il y a une part d’anticipation. Ce qui fait que la découverte est tout sauf déconcertante. Il y a tant de groupes qui ont perdu leur intérêt en chemin en déclinant à l’envi la même recette en perdant un peu leur inspiration et diluant leur intensité dans trop de choses pareilles pour qu’on n’apprécie pas leur constance. Le cas Placebo est exemplaire à cet égard. Mais les musiciens de The National ont gardé intacte leur envie et leur maitrise. Si on sent ça et là que certains morceaux sont un peu en roue libre (surtout quand l’album avance), il n’y a jamais de morceau qui déshonore. Sans doute que des albums comme ceux de Clogs (dont les deux membres fondateurs sont au line-up de The National) sont ils pour quelque chose dans leur passion visiblement intacte.
C’est comme une série dont toutes les saisons sont bonnes, dont on sait dès le générique qu’on va rester scotchés jusqu’au bout. On se dira peut-être qu’il y a des ficelles de scénario mais on aime bien les acteurs et on ne voit pas le temps passer.
Et puis, voilà, ils ont une botte secrète (c’est pas faux) qui est la voix exceptionnelle de baryton de Matt Berninger. De celles qui marquent tout ce qu’elles font, comme celle de Stuart Staples. Sur Sorrow, sa simple présence, sa façon d’être en minime décalage de temps sur une progression d’accords mineurs classique mais comme toujours bien amenée, suffit à faire d’une chanson sans doute pas exceptionnelle en soi un bon moment.
Cet album passe après le sans-faute de Boxers et va sans doute un peu pâtir de la comparaison. Mais il serait injuste de dénigrer ce High Violet pour autant. On a aimé puis détourné des Franz Ferdinand, Bloc Party, Editors, Maximo Park ou autres LCD Soundsystem, et la liste est encore longue de ces semi-déclins, de ces lassitudes injustes souvent qui nous ont saisies. Ne prenez pas ça pour de la frilosité, mais cet album est rassurant. Parce qu’il est une valeur refuge, une certitude dans cette si versatile musique pop. Et puis surtout, c’est un bon album tout court.
Bien honnêtement, quand on a découvert Beirut en 2006, on ne se doutait pas qu’on allait suivre le jeune Zach Condon pendant plus de 17 ans. Cette musique fortement influencée par les fanfares balkaniques a suscité d’emblée l’intérêt mais le procédé semblait trop étriqué pour s’inscrire dans la longueur. On avait tort, forcément, et ceci en est un nouveau rappel.
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