dimanche 15 mai 2011, par
On poursuit hors du train-train des sorties avec une autre review de concert, en direct – allez, disons en léger différé – des Nuits du Botanique, pour ce qui s’annonçait comme la programmation la plus incohérente de cette quinzaine...
Les concerts du jour au Cirque Royal n’ont pas réellement fédéré les foules. Aussi les organisateurs ont-ils jugé opportun de remplir le parterre de sièges moins légitimés par le confort optimal du public, que pour jouer les cache-misère et combler le vide angoissant que le peu d’affluence a creusé dans le cœur de la salle. Commodément installé aux premières loges, on attend donc de voir ce que cette soirée enchaînant chanson française pointue, début de hype bobo et folk-rock expérimental aura à offrir d’émotions hétéroclites. Fondu au noir.
Laetitia Velma foule la scène accompagnée de son comparse Dominique A – disons même ‘compagnon’ puisque les rumeurs people affirment que ces deux-là fricoteraient aussi à la ville. La première joue debout devant ses claviers, le second triture sa guitare comme un beau diable, lançant les pistes rythmiques préenregistrées qui donnent aux chansons le souffle nécessaire. Manifestement peu à l’aise, l’auteure de l’excellent “Les Eaux Profondes” danse parfois sous l’emprise d’une drogue invisible et prend la parole pour quelques échanges maladroits, ce qui ne l’empêche pas de sourire tout le temps.
Le plaisir est palpable, offrant un décalage plutôt fascinant avec le contenu grave des morceaux, par ailleurs interprétés avec conviction. Cela dit, le set peine à décoller et c’est réellement Dominique A qui sauve la mise en faisant subir à sa guitare quelques jolis moments de transe. Mon Cœur et Retournez-Vous, seuls morceaux où Laetitia n’est pas au piano, sont à ce titre particulièrement prenants. Le reste du temps, l’absence d’un groupe plus conséquent pour soutenir les frêles épaules de la chanteuse joue tout de même en sa légère défaveur.
L’actrice Mélanie Laurent, en revanche, peut compter sur un solide line-up pour étayer son passage à l’acte scénique. L’incorporation d’un violoncelliste et d’une violoniste, en sus du schéma pop classique, donne à ses morceaux une rondeur bienvenue. Quant au plaisir d’être là, il est presque surjoué : conquise par un public belge connu il est vrai pour sa qualité d’écoute et d’accueil, Mélanie Laurent se laisse aller à une spontanéité de tous les instants, même si elle tient souvent à la private joke avec ses musiciens, visiblement ravis d’être là aussi malgré un rôle parfois ingrat.
Condamné aux vieilles ficelles et aux rythmiques de première base, le batteur semble muselé derrière ses fûts, tout comme l’ensemble du groupe qui sonne assez bande-mou. Mais alors qu’on s’ennuie carrément, la majorité du public semble être venu pour Mélanie Laurent et fait un triomphe à ses envolées façon Coldplay du pauvre. Les charts, on le sait, sont sans appel sur ce qui plaît au plus grand nombre ; la comédienne, habituée à la lumière, a manifestement été élevée aux grands noms du genre. Comme on le reprochait récemment à son album, les chansons sont truffées de wouwou et autres lalala dont le systématisme finit par agacer – sauf qu’on a pris le parti d’en rire.
Le plus sérieusement du monde, la chanteuse nous demande de faire wouwou sur le petit tube Kiss, en presque fin de concert et alors que les quotas sont déjà largement dépassés... avant de conclure en annonçant de façon mensongère un dernier morceau sans wouwou, preuve que ses tics d’écriture sont parfaitement inconscients. Alors on en rajoute pour de rire dans l’enthousiasme forcé, même si le répertoire aligné est loin de mériter tant d’égards. Constatant pourtant combien sa gratitude est touchante, on contribue à donner à Mélanie Laurent l’envie de continuer son deuxième métier.
Le plaisir de ces artistes est sincère et communicatif, et il présidera encore au concert bancal donné par Joseph Arthur devant un Cirque Royal clairsemé, déserté par des fans de chanson française qui ne venaient pas pour lui ainsi que les couche-tôt découragés par la trop longue attente. En effet, des problèmes techniques insolvables vont retarder l’entrée en scène de Joseph d’une bonne demi-heure. Lorsque finalement il pénètre sur scène, lumières encore tout allumées, lassé de voir la durée de son show s’effilocher à la merci du couvre-feu officiel, c’est pour se saisir d’une guitare folk mal branchée et entonner un Chicago grésillant.
Sans se démonter, l’artiste la troque contre une Fender blanche avec laquelle il jouera toute la première partie du concert, des extraits dépouillés de son troisième album (Redemption’s Son et Honey & the Moon) aux impromptus expérimentaux qui nous font encore nous demander, au moment de le voir pour la quinzième fois sur scène, où Joseph Arthur puise la force de trouver chaque fois de nouvelles pistes pour sublimer ses morceaux. L’interprétation de Temporary People est incendiaire, et Joseph sample jusqu’à son solo de guitare pour y incorporer un de ses poèmes, déclamé avec une intensité qui coupe le souffle.
Construit sur un schéma assez proche, ce qu’on avait sans doute plus entendu de sa part depuis dix ans et Creation or a Stain, l’inédit I Miss the Zoo rejoindra les dizaines de perles cachées qu’Arthur lâche à ses concerts et qui ne verront sans doute jamais l’ombre d’un studio. Finalement, l’Américain retente sa chance avec une autre de ses guitares peinturlurées et enchaîne quelques extraits de son nouvel album à venir : Out on a Limb est une vraie merveille, au même titre que le délicat This Is Still My World, et ce retour à une carrière solo chargée de nuit et de mystères sera accueilli avec bonheur après des années d’errance classic-rock en compagnie de groupes vains.
« Ow, Murphy’s law ! » lance Joseph Arthur au moment où il s’apprête à entonner In the Sun et que son micro tombe en rade. Le vendredi 13 semble avoir demandé une rallonge de 24 heures, car c’est bien la poisse qui colle aux basques de l’artiste maudit. Bénies pourtant soient les circonstances : Joseph s’en accomode en débranchant sa guitare et, totalement unplugged, livre un poignant enchaînement de très grands morceaux (Toxic Angel, Birthday Card,...) sans une once d’électricité, « comme au temps de Shakespeare ». Le Cirque Royal tend l’oreille plus fort et se tient le cœur. L’humeur du chanteur est aussi joviale que sa musique est cafardeuse, le moment aussi cocasse que purement magique.
En rappel, Joseph Arthur se livre à une activité qui ne surprend plus les habitués, se mettant à peindre tout en chantant. L’expérience d’un de ses concerts reste un de ces moments indescriptibles qui défient les principes mêmes de folie créatrice et de spontanéité. L’expression d’un génie à l’œuvre, d’un artiste qui a constamment besoin d’inventer et de réinventer pour se sentir vivant, quitte à dévaler du sommet de son art pour livrer des prestations erratiques, cabossées, mais toujours aussi impressionnantes d’aisance technique et d’imprévisibilité. À ceux qui n’en peuvent plus des performances lisses et millimétrées, disons que la soirée aura en tout cas offert son lot d’antidotes.
Setlist Laetitia Velma
1. Au-Delà / 2. Le Pays Étranger / 3. Mon Cœur / 4. Les Eaux Profondes / 5. Le Jour Naissant / 6. Avant Que Tout S’effondre / 7. Retournez-Vous / 8. Les Cheveux et les Larmes
Setlist Mélanie Laurent
1. Je Connais / 2. En T’Attendant / 3. Il Fait Gris / 4. Pardon / 5. Circus / 6. Tango / 7. Insomnie / 8. Everything You’re Not Supposed to Be / 9. Kiss / 10. Uncomfortable
Setlist Joseph Arthur
1. Chicago / 2. Isobel / 3. Temporary People / 4. Redemption’s Son / 5. Honey & the Moon / 6. I Miss the Zoo / 7. Too Much to Hide / 8. Gypsy Fading / 9. Out on a Limb / 10. Love Never Asks You to Lie / 11. This Is Still My World / 12. In the Sun / 13. Toxic Angel / 14. Birthday Card / 15. You Are Free / (Rappel) / 16. Echo Park / 17. Lack a Vision
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