jeudi 8 mars 2012, par
Créateur de musique
Il est des artistes pour lesquels les mots ne me viennent pas aisément. Je ne suis même jamais arrivé à mettre en article ce que m’inspirait The Mysterious Production of Eggs. Il a fallu attendre les deux suivants pour qu’enfin j’arrive à exprimer mon attachement. Avec le recul d’ailleurs, on peut affirmer qu’Armchairs Apocrypha et Noble Beast étaient assez renversants. Il serait sans doute hasardeux de placer ce Break It Yourself dans leur lignée. Non que sa dernière production en soit indigne, mais en étant plus discret et versatile, il se présente comme moins séduisant.
Comme moins flamboyant, moins démonstratif aussi. Il ne faut pas oublier que ses mélodies restent simples et directes, ce qui rend sa musique attachante (Fatal Shore), et les circonvolutions, bien que moins nombreuses, sont toujours là. Et puis si auparavant il pouvait sembler le seul détenteur de la clé de ses morceaux, on sentait qu’il y en avait une. Il ne se perd jamais pourtant, mais il est intéressant de constater qu’il prend souvent la tangente, qui désamorce systématiquement toute tentative de se fixer à un canevas. Un morceau comme Give It Away commence presque comme un interlude avant qu’il ne démarre vraiment, se torde en passages un peu irritants avant de retrouver un peu de douceur grâce aux voix. De même, il ne s’aventure qu’un peu vers le bluegrass, il revient assez vite à sa syncope de base (Orpheo Looks Back). Ce qui permet aussi de garder une unité malgré les différents apports, allant jusqu’à des rythmes caribéens (Danse Carribe).
Cette batterie syncopée est d’ailleurs assez importante, et il peut bénéficier de l’apport non négligeable de Dosh qui peut aussi se débrouiller tout seul en tant qu’artiste solo (quelques albums au compteur et c’est lui qui assure seul les premières parties). Andrew Bird est un musicien, bien évidemment, mais on pourrait aussi le qualifier de créateur de musique. C’est spécialement prégnant en concert (vivement ce soir !) où certains procédés qui confinent à la virtuosité (l’assemblage de couches comme le pratique aussi Owen Pallett) nous font assister à la naissance d’un morceau. Si on ajoute à cette façon de procéder quelques habitudes personnelles comme le sifflement (il peut en faire un riff) ou le pizzicato, on pourra conclure que l’univers d’Andrew Bird est cohérent et que cet album en est une émanation.
Alors, on ne s’étonnera pas de le voir reprendre bien des éléments d’Arcs and Coulombs (morceau présent sur la BO de Norman paru l’an passé) sur Lusitania, où il convie de façon assez logique Annie Clark (St Vincent) pour entonner d’un ton parfait Go ahead say something dumb, boy, there’s no shame. La surprise, finalement, c’est de retrouver quelques morceaux vraiment minimaux (Fatal Shore, Sifters, Hole In The Ocean Shore), comme s’il voulait prouver qu’il n’a pas besoin d’emphase pour que sa personnalité s’exprime. Ou alors, peut-être que cette sécheresse correspond à son état d’esprit du moment.
Il serait un peu court de dire que le dernier album d’Andrew Bird est plus terne. Certes, il est un peu dépourvu de la légèreté versatile des deux précédents albums (qui restent des sommets), mais on retrouve une autre facette de cet artiste singulier. Plus sèche, plus resserrée, qui s’aventure par bribes aux limites de ses procédés.
Depuis le 2 janvier 2007, la musique de Basia Bulat est dans nos vies. Et elle y est restée. Après avoir revisité sa discographie avec un quatuor, la revoici avec du nouveau matériel initialement composé en midi. En mode disco donc ? Non, pas vraiment, même si Angel s’en approche un peu. Le décalage avec sa voix chaude est intéressant en tous cas.
Dans le rayon du mid-tempo plus roots, des (…)
Comme Raoul Vignal dans un genre proche, l’évolution de Jawhar l’amène à plus de douceur, à plus de rondeur, avec une vraie beauté qui en résulte, un peu différente de celle des débuts, mais tout autant indéniable. Lui qu’on avait notamment entendu aux côtés de Françoiz Breut ou Monolithe Noir dans un passé récent, il reprend ici le fil de sa discographie avec une certaine continuité. Ne (…)
On apprécie toujours le retour d’un ami de longue date, surtout s’il reste empreint d’une grande beauté. Comme on l’avait signalé à la sortie du précédent Years in Marble, il s’éloigne d’influences comme Nick Drake (avec un picking virtuose) pour favoriser un mid-tempo qui coule de source comme South, Brother qui relate ses retrouvailles avec son frère qui vit en Espagne. La finesse d’écriture (…)
On l’a dit, on connait remarquablement peu d’artistes pour les plus de 2000 critiques écrites ici. Pourtant quelques camaraderies virtuelles ont pu se développer. A force de commenter les albums de The Imaginary Suitcase, j’ai même eu droit à une écoute préliminaire de cet album. Ceci est juste une petite mise au point au cas où vous viendrez fort légitimement douter de mon objectivité en la (…)
Comme un Perfume Genius qui a émergé à la même époque, Trevor Powers est passé de petit génie de la bedroom pop intime à singer/songwriter aux possibilités pas encore complétement cernées. Le point de départ de cet album est la découverte d’anciennes vidéos de son enfance retrouvées dans la cave de ses parents. C’est pourquoi on entend beaucoup d’extraits de vidéos, de conversations. (…)
Il y a des artistes qu’on côtoie depuis très longtemps, dont l’excellence semble tellement aller de soi qu’on est surpris qu’ils arrivent à se surpasser. On la savait sociétaire d’un genre en soi dont d’autres membres seraient Angel Olsen ou Emily Jane White, voire Bat For Lashes. De fortes personnalités à n’en pas douter. Mais sur cet album, le ton est bien plus rentre-dedans que chez ses (…)
On a déjà avancé l’idée que The National serait le plus grand groupe de rock du monde. Ou alors pas loin. Mais sans doute par défaut. Il faut dire que leur succès est arrivé sur le tard et presque malgré eux. Ils peuvent se targuer d’une impressionnante discographie. Et puis il y a cette sensation que les albums s’enchainent sans que leur statut n’impose leur contenu. Ils arrivent à avoir des (…)
Jamie Stewart est un artiste qui fait de la musique excitante. De combien pouvez-vous dire ça ? On ne veut pas dire qu’il a toujours tout réussi, tout le temps, mais on prend toujours de ses nouvelles avec une curiosité certaine. On sait qu’on va être surpris, un peu secoués et peut-être même un peu soufflés. Ou même beaucoup soufflés dans le cas qui nous occupe, à savoir le successeur du (…)