Accueil > Critiques > 2013

Vampire Weekend - Modern Vampires of the City

mardi 25 juin 2013, par marc

Vampire gris


Une légende bien plus tenace que vraiment avérée veut que le troisième album d’un groupe soit déterminant pour la suite des événements. Difficile de se projeter dans le futur, mais la troisième livraison des New-Yorkais était sans doute attendue au tournant. Paradoxalement, bien moins quela première qui les avait brusquement projetés sous les feux de la rampe.

La première écoute est un peu déconcertante, parce qu’on ne retrouve pas nécessairement les ingrédients qui ont fait de Vampire Weekend ce qu’on en connait, cette fausse pop insouciante de petit blanc qui va puiser ailleurs de quoi améliorer son ordinaire sonore. Obvious Bicycle est en tout cas une bien étrange porte d’entrée, trop lente pour vraiment attiser l’attente. Unbelievers est autrement plus emballant, plus rapide tout simplement. Parce que la spontanéité, la vivacité sont primordiales quand on veut emballer de la musique pop.

Quand on le compare à d’éventuels coreligionnaires, Vampire Weekend garde quelques franches longueurs d’avance puisqu’ils ne se perdent pas dans des compositions trop alambiquées. Il reste donc des mélodies, c’est ce qui a toujours fait la différence. On en retrouve au détour de Step qui instille un peu de mélancolie dans cet univers jamais aussi rose qu’il n’y parait. Hudson ose être plus pesant et Don’t Lie quant à lui ressemble à une version ralentie de morceaux du passé. On avait senti avec I Think Ur A Contra sur le dernier album qu’un revirement pouvait se préparer. Il est toujours en cours, mais certainement pas achevé. On n’avait pas trop voulu le voir à l’époque, mais la descente était bel et bien amorcée.

Les morceaux hyperactifs ne sont plus là, et ils manquent vraiment pour passer d’album agréable à usine à tubes. Ya hey pourrait être celui-là malgré l’irritant gimmick de voix triturées. Il reste donc de vrais morceaux bien évidents quand la vitesse est maintenue (Worship You), mais il faut bien le reconnaître, la densité de ces moments décroit sensiblement depuis le premier album. Un bon album du genre doit passer de tube potentiel en tuerie en puissance sans faiblir. Ici, on gigote gentiment parfois, mais ce n’est plus la musique séminale qui s’adresse aux membres. On est trop exigeants, certes, mais vis-à-vis d’un groupe largement au-dessus de la mêlée.

Moins flashy, plus lent, plus introspectif, cet album n’a pas tous les ingrédients qui avaient fait des deux premiers (d’accord, surtout le premier). Ils ne sont sans doute pas arrivés à ce stade inévitable où ils veulent prouver qu’ils peuvent faire de ‘vraies’ chansons (c’est ce que Franz Ferdinand a fait avant de sombrer dans l’oubli) mais trouver un second souffle après un album brillant est visiblement compliqué pour ces jeunes groupes. Certes, leur potentiel de sympathie ne s’érode que lentement (d’autant qu’il est ancien), mais il s’érode tout de même.

http://www.vampireweekend.com/

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

  • Cross Record – Crush Me

    Depuis eux albums, Cross Record est le projet solo d’Emily Cross. Chanteuse de Loma, elle agit aussi en tant que ‘Death Doula’, autrement dit en assistant des fins de vie. Elle a aussi quitté son Texas pour le Dorset et est devenue mère, ce qui ne doit pas être un mince ajustement. Donc quand on décèle que c’est une chanteuse habitée, tout ce substrat prend son sens, prend chair même. (…)

  • Youth Lagoon - Rarely Do I Dream

    Comme un Perfume Genius qui a émergé à la même époque, Trevor Powers est passé de petit génie de la bedroom pop intime à singer/songwriter aux possibilités pas encore complétement cernées. Le point de départ de cet album est la découverte d’anciennes vidéos de son enfance retrouvées dans la cave de ses parents. C’est pourquoi on entend beaucoup d’extraits de vidéos, de conversations. (…)

  • Sharon Van Etten - Sharon Van Etten & The Attachment Theory

    Il y a des artistes qu’on côtoie depuis très longtemps, dont l’excellence semble tellement aller de soi qu’on est surpris qu’ils arrivent à se surpasser. On la savait sociétaire d’un genre en soi dont d’autres membres seraient Angel Olsen ou Emily Jane White, voire Bat For Lashes. De fortes personnalités à n’en pas douter. Mais sur cet album, le ton est bien plus rentre-dedans que chez ses (…)

  • The National - Rome

    On a déjà avancé l’idée que The National serait le plus grand groupe de rock du monde. Ou alors pas loin. Mais sans doute par défaut. Il faut dire que leur succès est arrivé sur le tard et presque malgré eux. Ils peuvent se targuer d’une impressionnante discographie. Et puis il y a cette sensation que les albums s’enchainent sans que leur statut n’impose leur contenu. Ils arrivent à avoir des (…)