Accueil > Critiques > 2016

Will Butler - Friday Night

jeudi 30 juin 2016, par Marc


Sans doute pour échapper aux stades auxquels Arcade Fire se destine, Will Butler décide de défendre son album sorti l’an passé en investissant des clubs pour un show qui repose en grande partie sur la connivence avec le public. Le résultat a évidemment un gros potentiel d’amusement qu’Arcade Fire n’a plus. La preuve par ce Friday Night qui est une captation live d’une performance du turbulent petit frère de Win, l’inamovible leader avec sa femme Régine Chassagne du désormais hénaurme groupe de Montréal.

Son sens du spectacle s’incarne en tous cas en d’amusants gimmicks. Commencer un album live par les rappels n’est en effet pas banal, tout comme il est inhabituel (mais pas inédit) d’avoir recours à une comédienne pour l’introduire et divertir un long chorus final. C’est en effet Jo Firestone qui demande au public de copieusement le huer à son entrée sur scène et qui vient divertir le final Friday Night. On est à ces moments-là plus proches de l’entertainement pur, même si les interventions parlées sont assez limitées tout au long de l’album. Le ton acerbe est impré.gné de second degré, lequel a entièrement disparu des plus compassés Arcade Fire.

Il est accompagné d’un vrai bon groupe , même s’il ne reçoit pas le renfort de Jeremy Gara ici. Ce qui rend cet album paradoxalement plus plaisant et direct que son prédécesseur en studio et réserve pas mal de nouveautés. La setlist est en effet plus fournie que celle du studio, ce qui nous vaut une bonne moitié d’inédits et quelques bons moments aussi. Notamment sur un Sun Comes Up très bien maîtrisé, ressemblant un peu à ce qu’on entendait sur les derniers The Rapture et dont les plus attentifs remarqueront que les paroles font référence au I Shall Be Released de Bob Dylan.

D’autres sont construits sur une tension patiemment construite comme Madonna Can’t Save Me Now, qui assure la transition avec le plus funk Something’s Coming (aussi proche de l’axe The Rapture/  !!!). Evidemment, on le sent plus à son aise sur le plus garage Take My Side ou le presque post-punk II que sur la plage titulaire. Non, ce n’est pas un interprète inoubliable mais il fait indéniablement le job. Notons aussi que les trois musiciens semblent particulièrement à l’aise, leur solidité permettant à leur leader d’amuser la galerie en toute sérénité.

Si on pensait que ce premier album solo de Will était un acte d’émancipation, une façon de garder intacte sa créativité en marge des activités du groupe de base fortement chapeauté par son grand frère Win, ce live vient confirmer qu’il en a encore sous la pédale, qu’on tient un artiste à part entière, capable de défendre son univers propre en studio ou sur scène. Et on se dit qu’on ne ratera plus son prochain passage pas loin de chez nous.

    Article Ecrit par Marc

Répondre à cet article

  • Feist - Multitudes

    On n’a qu’une chance de faire une première bonne impression. C’est via un album soyeux qu’on écoute encore beaucoup 20 ans après qu’on a fait connaissance du talent tellement attachant de Leslie Feist et on n’a jamais décroché parce qu’elle ne nous a jamais déçus non plus.
    On n’a qu’une chance de faire une première bonne impression. Et c’est avec le délicieusement psychédélique In Lightning qu’elle revient (...)

  • Samuele - Une Paillette dans l’engrenage

    Il me faut commencer par une confession : j’ai un peu de mal avec les accents québécois trop typés ou le créole en chanson (seulement en chanson, je précise...). C’est comme ça donc cette écoute commençait par un petit handicap. Alors on se lance, histoire de voir si on arrive au bout d’une écoute. Et ça marche, alors on recommence, encore et encore.
    Pourquoi ? Parce que le ton pop est parfaitement (...)

  • Metric – Fromentera

    Il est troublant de noter le retour de Metric quelques semaines après celui de Stars. On associe mentalement les deux groupes de Toronto parce qu’ils sont contemporains, que les chanteuses ont toutes deux participé à des albums de Broken Social Scene et surtout parce qu’ils ne nous ont jamais vraiment déçus.
    On sait tout de suite qu’on ne le sera pas cette fois-ci non plus grâce à Doomscroller. Leur (...)

  • Spencer Krug - Twenty Twenty Twenty Twenty One

    Même s’il y a eu quelques années fastes, même Jean-Louis Murat ne se montre pas aussi productif que Spender Krug. Lui qu’on a croisé avec Wolf Parade, Sunset Rubdown, Swan Lake et Moonface avec ou sans Siinai officie depuis l’an passé aussi sous son propre nom. Fading Graffiti n’avait pas laissé un souvenir impérissable. Mais connaissant le bonhomme, on savait qu’il ne faudrait pas attendre longtemps (...)

  • Angrusori - Live at Tou

    Quelle est la chance d’un cocktail dont vous n’êtes pas fans des ingrédients vous plaise ? Elle n’est pas énorme peut-être mais elle n’est pas mince non plus, et c’est dans cet interstice que s’est glissé cet album d’Angrusori. Il se propose en effet de partir d’un corpus de musique traditionnelle rom slovaque revu par le filtre d’un ensemble contemporain norvégien.
    Si cette association semble étrange (...)

  • Shearwater - Rook (mostly) solo in London, 2018

    On ne peut pas vraiment dire que Jonathan Meiburg soit quelqu’un de vénal. Il a même dû faire appel à l’équipe pour boucler la tournée des excellents Loma. Donc, s’il multiplie les sorties, ce n’est pas pour occuper le terrain. De plus, les bénéfices des ventes (en numérique et sur Bandcamp exclusivement) iront à l’International Rescue Committee qui soutient et défend les réfugiés partout dans le monde. A (...)

  • The National - Boxer Live In Brussels

    Quand une critique tarde, ce n’est pas trop grave, l’album a une certaine durée de vie et la disparition presque complète de ce qu’on a appelé la blogosphère musicale rend encore moins impérieux le besoin de publier vite. Si on essaie de se conformer tant bien que mal au calendrier des sorties, on n’y colle pas au jour près. Par contre, une fois passé le lendemain d’un concert, on estime que c’est trop (...)

  • Shearwater - The Sky Is A Blank Screen

    S’il est une chose qu’on ne pourra pas reprocher à Shearwater, c’est celle de ne pas occuper le terrain. Depuis leur album Jet Plane and Oxbow de l’an passé, on a en effet eu droit à deux sorties virtuelles d’anciens concerts et une reprise intégrale du Lodger de David Bowie. Et maintenant sort ce live qui témoigne de la pertinence de leurs prestations publiques. Espérons que cette politique soit (...)