vendredi 4 septembre 2020, par
Si vous voulez la version courte, ce cinquième album d’I LIKE TRAINS est un des plus percutants de l’année, et ça s’écoute en dessous de l’article. Si vous voulez un peu plus de détail, on peut commencer par un rappel des faits.
On avait craqué tout de suite pour le groupe de Leeds, pour ce mélange de sons et structures post-rock utilisés dans des morceaux qui reposaient aussi sur la voix de baryton de David Martin. Il y avait ce sens du paroxysme qui vrillait l’âme au casque ou en concert. Il y avait là-dedans plusieurs de nos morceaux préférés tous genres et toutes époques confondus. C’est aussi le premier compte-rendu de concert de ce site, ça compte. Ils ont évolué, bien entendu, ajoutant un peu de groove (tout est relatif) et on a pris un plaisir immense à retrouver tout ça lors d’une tournée qui célébrait les dix ans de leurs débuts. On ne se doutait pas qu’il s’agissait d’un adieu, d’un long au-revoir.
On avait entendu les singles annonciateurs dont The Truth, cet album ne nous a pas pris au dépourvu, on savait que leur talent était resté, mais que la noirceur s’était déplacée. Exit évidemment les tenues ferroviaires, les récits de catastrophes, les ténèbres, c’est ici et maintenant, on le sait. Mais ce n’est absolument pas une complainte, ils ont du puiser dans leur hiatus l’énergie vitale qui la transcende.
Les sons de guitare d’A Steady Hand semblent plus provenir d’A Place To Bury Strangers que d’Explosions In The Sky et rehaussent ce morceau dont le chant évoque plus Mark E Smith que Matt Berninger. Desire Is a Mess prolonge cette veine post-punk plus abrupte, avec un rien plus de lyrisme, montant l’album d’un cran encore, avec leur façon particulière d’asséner des phrases qui nous restent.
How do you sleep at night/How do you sleep at night
On est déjà séduits, on ne sait pas encore que le meilleur est encore à venir. C’est aussi à ça qu’on sait qu’on écoute un album exceptionnel quand on ne descend jamais sous une qualité très élevée. Il faut attendre Prism pour que le chant plus suave revienne, dans un morceau qui a la mélancolie du dancefloor, celui qu’on aborde seul les bras écartés, quand la piste est le salon et personne dans les environs. Il se place dans la lignée de The Turning of The Bones et marque un virage pour cet album, la preuve que ce n’est pas que dans l’effet boeuf produit sur l’auditeur que la continuité avec leur brillante discographie est assurée. On pense aussi à The National sans la recherche frénétique de la sophistication.
De l’avis général, Dig In est un morceau qui frappe tous ceux qui l’écoutent et je me range pour une fois à l’avis général. KOMPROMAT (rien à voir avec l’excellente formation electro déjà évoquée) est donc tout sauf un album monochrome. Ou plutôt, comme l’art conceptuel nous a appris les nuances de l’unicolore, ils arrivent à tirer des teintes infinies.
Ce qu’ils ont gardé aussi, c’est un sens dramatique qui leur permet de relancer les morceaux, placer non une accélération mais une densification qui amène le morceau au-delà de lui-même, là où peu peuvent aller. C’est ce qui rend cet album plus fort que ce qu’on entend dans le genre, ces paroxysmes se retrouvent partout ici, emportant l’adhésion sans coup férir, laissant du coup les débuts de morceaux prendre de la hauteur en emmagasinant de l’oxygène. A Man of Conviction ou New Geography sont ainsi bâtis, avec une densité qui vient des guitares, une tension qu’ils arrivent à relâcher et à relancer à coups de kick et de basse. Leur force ne se fait donc jamais systématique.
Et puis il y a The Truth, cette version gothique de Gill Scott Heron, logiquement cité ici (The truth will not be televised). Au sein de ce brûlot (voyez l’hypnotique clip), ils arrivent à placer une belle accélération pour s’imposer comme un des morceaux les plus emblématiques de 2020. Le soliloque final restera. Il est remarquable que les deux albums les plus corrosifs sur la situation du monde dont on ait parlé ici proviennent soit de l’ancien leader d’une formation qui a supporté la vague psychédélique et d’un groupe autrefois fasciné par les catastrophes ferroviaires.
Même la descente avec la collaboration d’Anika fait partie de ce tout compact. Sa voix de lendemain de veille porte le poids du monde. Ils relancent un peu le morceau pour la forme, pour une fin qui ne ressemble pas à un démontage de chapiteau.
Il n’y a que neuf titres, certes, mais il n’y en a aucun qui ne marque pas. Le post-rock et le post-punk sont deux genres qu’on apprécie (qu’on adore, soyons honnête) et leur union est ici plus forte que jamais. C’est plus qu’une évolution qu’I LIKE TRAINS a réussi. Garder son intensité tout en captant le moment comme personne, c’est la gageure de ce qui est un des meilleurs albums de l’année.
Ce qui est rare est précieux. Et dans un contexte musical où le post-rock se raréfie, les plaisirs que confèrent une formation comme Mono ne sont pas reproductibes par d’autres genres et deviennent d’autant plus précieux. Mais cette rareté ne confère pas pour autant le statut de chef-d’œuvre au moindre album du genre, loin s’en faut même.
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