vendredi 17 novembre 2023, par
Il me semble que ça fait longtemps que je ne vous ai plus relaté de soirée dans des endroits obscurs. L’occasion est belle de renouer avec la tradition. On commence logiquement par une première partie et elle est assurée par Norman Westberg. On l’a déjà croisé avec Swans et on se dit que prendre un membre du groupe comme première partie est une idée largement repandue, avec Josh Tillman (Fleet Foxes) ou Tyler Ramsey (Band of Horses). On ne le retrouvera pas auprès de Michael Gira, cela dit. Il bidouille sa guitare, sa pédale de loop et a un petit sablier pour ne pas perdre la notion du temps. Ah oui, c’est plutôt ennuyeux...
L’ennui ne sera pas le sentiment qui domine pour la prestation de Swans. Certes, la longueur du concert (on y reviendra) implique presque des moments plus longuets mais ils placent d’emblée leur univers sonore. Leur dernier (long aussi) The Beggar a beau être moins rude que certains de ses prédécesseurs, il est dans la droite ligne de ce qu’ils ont fait depuis leur retour remarqué de 2010, à savoir aventureux et très impressionnant.
C’est évidemment Michael Gira qui mène les débats. Assis la plupart du temps, il module ses musiciens à grands gestes, comme un chef d’orchestre. Et le son est gigantesque. On ne se doute pas qu’on peut sortir des sons pareils d’une basse. Il y a en a souvent deux, et on sait que la slide guitar de Kristof Hahn n’est pas là pour faire de la country. C’est l’ensemble qui impressionne, cette propension à s’appuyer sur la répétition pour que ce soit dantesque. Evidemment, le charisme de Gira, qui avait l’air dans d’excellentes dispositions, participe énormément de l’expérience. C’est incantatoire, recueilli. Dans le genre, il semble avec son groupe se présenter comme le point médian entre Nick Cave et Godspeed.
Bref, on n’est pas là pour entendre une litanie de courts tubes, mais voir la musique, le son prendre forme devant nous. Le terme expérience est sans doute galvaudé mais on est exactement là pour ça. Certes, on n’est pas extrêmement familiers de leurs morceaux mais on est un peu en peine de les nommer aussi. Pas grave, on se laisse porter.
Sur le coup de 23h30, après deux heures et demie de concert, alors qu’ils semblaient partis pour passer la nuit sur place, une petite note les sommant d’arrêter fait irruption sur le pupitre de Gira manifestement dépité. Bien honnêtement, la démonstration était suffisante mais c’est un peu abrupt comme fin. On en sort forcément un peu abasourdis mais toujours ravi d’avoir partagé ce moment unique.