Accueil > Critiques > 2006

The Black Heart Procession : The Spell

lundi 28 août 2006, par Marc


Un groupe culte est connu par relativement peu de gens mais est fort apprécié par son audience. Loin d’être confidentiel, The Black Heart Procession sort son cinquième album sans ramdam médiatique mais les connaisseurs sont sur le coup. Après trois albums numérotés logiquement de 1 à 3 et une incursion vers les rythmiques tropicales plutôt réussie, ils reviennent à leurs premières amours et ajoutent ça et là une touche d’électricité qui leur sied ma foi pas mal.

Une des singularités jamais démenties de The Black Heart Procession, c’est un sens mélodique hors du commun qui transcende un morceau comme The Letter. Sans être exagérément léger, le style pratiqué est une sorte de mélancolie réjouissante. Si cet oxymoron vous rebute, sachez qu’il en est ainsi de la plupart des groupes intéressants traités en ces colonnes.

Loin de tomber dans le gloubiboulga sonore, les instruments supplémentaires comme le violon restent discrets et, par là, plus efficaces. Efficacité est un mot d’ailleurs qui convient bien puisque tout ici l’est. Tout fonctionne. Ils se permettent même des riffs électriques (GPS) en maintenant leur niveau d’exigence.

Les points de comparaison ne sont pas légion. Bornons-nous à dire que si cette musique est sombre, elle n’est en rien désespérée. On pense souvent à Nick Cave (Places) dans sa période intermédiaire (c’est à dire ni terroriste sonore ni crooner crépusculaire). Le tout n’est jamais glauque ni plaintif cependant.

Cette nouvelle manière un rien plus électrique dissipe encore plus l’envie de coller des étiquettes. Ca ne va pas vous aider vous entends-je marmonner. Parler de musique c’est comme danser de la peinture comme le disait fort judicieusement le pourtant cérébral David Byrne (chanteur des Talking Heads pour dispensable rappel). Bornons-nous simplement à constater que dans leurs meilleurs moments (et cet album en compte), The Black Hearts Procession vole à des altitudes où ils ne risquent de rencontrer que des oiseaux comme Sophia ou les Tindersticks. Ajoutons aussi le dernier The National pour faire bonne figure.

D’ailleurs, si vous avez un jour sombré sur Sophia, vous succomberez pareil sur To Bring You Back. Des sensations inédites depuis The Infinite Circle. Not Just Words est quant à elle la version plus prenante d’une balade que n’aurait pas renié REM. Waiter #5 est aussi un moment plus intime mais poignant pour ceux qui peuvent s’abandonner à ça.

Comme je mouille mon maillot pour ce site (vous verriez dans quel état il se trouve), j’ai profité de leur récent passage au Botanique pour ressentir en direct l’effet de ces titres. Eh bien mes amis, bien m’en a pris, c’est tout bonnement renversant. Si les anciens titres semblent plus faire réagir les gens sans doute pas encore familiarisés avec cette dernière livraison, des morceaux comme The Spell, The Letter ou To Bring You Back séduisent par leur intensité qui est plus importante encore que sur CD.

Donc, une confirmation plus électrique pour tous ceux qui connaissent les délices de The Black Heart Procession (une dédicace à la personne qui m’a fait connaître ça au passage) et la probable découverte d’un univers pour les autres. (M.)

    Article Ecrit par Marc

Répondre à cet article

  • H-Burns - Sunset Park

    La découverte d’un artiste qui nous plait s’accompagne toujours d’un sentiment de plaisir souvent teinté d’une pointe de mélancolie. Combien y en a-t-il d’autres, de pépites cachées ? On ne pourra pas répondre de façon définitive bien évidemment, on va se contenter de partager le coin à champignons qui d’ailleurs a été débusqué comme souvent par Laurent. Il aura fallu seize ans de carrière tout de même pour (...)

  • Modus Pitch - Polyism

    Quand on découvre un artiste, il est bon d’avoir quelques références. Ici, des collaborations avec Get Well Soon ou Modeselektor, une participation au formidable projet White Wine de Joe Haege et surtout la présence de P.A Hülsenbeck (remarquable artiste en solo ou avec Jüngstotter) viennent à la fois rassurer et attiser l’attente.
    Avec un pied définitivement dans le jazz (cinématique Drive) et (...)

  • Bazooka - Κάπου Αλλού (Kapou Allou)

    Non, la source d’artistes grecs ne s’est pas tarie, elle a même l’air de reprendre. On l’avoue, l’envie de s’enquiller un album en Grec n’est pas la proposition la plus sexy sur le papier. Si vous avez ce genre de réticence, sachez que vous pouvez l’oublier, elle disparaitra sans doute après quelques secondes.
    Bazooka pratique donc sa langue, mais pour être complètement honnêtes, c’est carrément (...)

  • Equipe de Foot - Géranium

    Quinze ans après Myspace, la tradition du nom de groupe étrange survit. Mais ce n’est pas le seul anachronisme ici. Le style pratiqué nous renvoie en effet plein d’années en arrière, au temps des nineties. Mais si beaucoup des formations qui font revivre ce temps-là penchent du côté alternatif de la force (The Poison Arrows, Beingmoved, Daydream Three), le duo bordelais privilégie une musique plus pop (...)

  • Nadine Khouri - Another Life

    Quand on retient un nom des années et des centaines de critiques plus tard, c’est plutôt bon signe, non ? C’est ce qui s’est passé avec Nadine Khouri dont l’écho de The Salted Air résonne encore à l’heure de découvrir cet Another Life. Ce n’est pas qu’il était flashy pourtant, ou que le style soit si singulier. Mais les morceaux font leur chemin tout seuls. Il y a des artistes qui font ça mieux, c’est comme (...)

  • Get Well Soon - Amen

    Avec 17 ans de bons et loyaux services, ce site a forcément vécu bien des découvertes d’artistes à leurs débuts. Certains ont filé à travers les filets lâches de la mémoire, d’autres sont restés vissés en permanence dans le champ des radars. Evidemment le groupe allemand Get Well Soon fait résolument partie de la seconde catégorie. On a suivi de très près leur évolution, concert après album. On sait aussi (...)

  • Lana Del Rey - Blue Banisters

    Les albums de Lana del Rey se succèdent à une telle vitesse qu’il n’est plus vraiment nécessaire de replanter le décor. Il ne s’est écoulé que sept mois depuis le précédent. Ce rythme de publication permet d’essayer des choses. Evidemment, le risque de dispersion est réel mais on ne doit rien déplorer dans ce secteur non plus. Notons aussi qu’un bon tiers de ces morceaux ont été composés il y a quelques (...)

  • PLEINE LVNE - Heavy Heart

    Faut-il remplacer les artistes, leur trouver à tout prix des substituts ? Non évidemment, ce serait négliger leur singularité. Pourtant, on peut trouver dans une découverte le prolongement de ce qu’on a autrefois aimé ailleurs. Ne tournons pas inutilement autour du pot, le Lyonnais Nicolas Gasparotto nous ramène immédiatement auprès du regretté Nick Talbot (Gravenhurst) et il va de soi que c’est une (...)