vendredi 6 octobre 2006, par
Les trésors cachés existent
La musique aussi charrie ses belles histoires. La genèse de cet album en est une. Nous y reviendrons. Concentrons-nous d’abord sur la musique. Celle de l’Allemande Sibylle Baier est d’une simplicité désarmante puisque à part quelques cordes sur le morceau de clôture Give Me A Smile on ne trouve qu’une guitare et une voix. A cet égard, on peut remarquer la remarquable variété de la musique qu’on peut produire avec des moyens aussi restreints sur papier. Dans ce cas-ci, la voix est belle et pure et mise en avant par rapport à sa délicate et discrète orchestration. Même si les femmes chantant des titres folk reviennent sur le devant de la scène (Marissa Nadler, Jana Hunter, Kelly De Martino, Catpower...), la première référence qui me vient en tête estLeonard Cohen. Même si la voix en est évidemment à mille lieues, la ressemblance avec les compositions du génial Canadien à la charnière des années ’60 et ’70 est troublante (I Lost Something In The Hills). C’est un peu comme si elle tentait et réussissait parfois à créer la magie de titres comme Famous Blue Raincoat.
Si vous vous frottez à cet album sans introduction, vous serez peut-être surpris par la vétusté de l’enregistrement, par les petites fautes techniques qui parsèment cet album. Il est temps de révéler le plus étonnant : ces titres ont été enregistrés entre 1970 et 1973. En effet, Sibylle Baier, jeune Allemande un peu hippie sur les bords à ce que j’ai compris, n’a en effet jamais eu pour ambition de chanter pour plus que sa famille et ses amis. C’est son fils, ayant transposé sur Cd les anciennes bandes maison pour en faire cadeau à sa mère, qui a trouvé qu’il serait dommage de confiner plus longtemps ces chansons si attachantes.
Mais l’intérêt dépasse largement celui des archives. Il y a en effet, parmi plusieurs titres au minimum dignes d’intérêt et souvent fort bons, deux authentiques diamants bruts. Il s’agit de Tonight et The End. Il plane sur ces deux titres une grâce rare. Elles sont de la race de celles qu’on n’oublie pas, la m »lodie, l’interprétation et l’impeccable effacement de la guitare qui sert juste de présentoir à la voix qui apparaît comme plus étendue dans ses possibilités que de prime abord. The End, particulièrement, montre l’étendue et la délicatesse de cette femme. C’est que ces chansons sont dégagées de toute contingence commerciale vu qu’elles n’étaient même pas destinées à être diffusées. On est face à de la pureté brute. C’est peut-être aussi ce qui touche tant, en sus du talent véritable
Une question qui se pose aussi est l’attachement d’une musique à son époque. Sorti en 2006, cet album n’est absolument pas incongru, pas plus qu’il n’aurait déparé les rayons des disquaires entre, disons, Songs From A Room de Leonard Cohen, Pink Moon de Nick Drake et un Joan Baez. Intemporel est une épithète galvaudée mais son emploi est ici nécessaire.
Fouillez vos greniers, épluchez toutes les bandes qui vous tomberont sous la main. Qui sait, peut-être mettrez-vous la main sur un trésor de ce calibre. Il n’est jamais trop tard pour devenir un classique. (M.)
Si vous voulez vérifier de vos oreilles la raison de mon emballement, il existe sur le site des Inrockuptibles (http://www.lesinrocks.com/) un mp3 de The End. C’est légal, gratuit et superbe. Elle est pas belle, la vie ?
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