mercredi 2 mai 2007, par
Leçon d’album
Comment ne pas perdre les fans de la première heure en recopiant servilement les recettes qui ont marché ou en déroutant tout en évoluant pour ne pas se retrouver enfermée dans un carcan musical ? C’est un problème auquel sont confrontés tous les groupes qui doivent donner un successeur à un album qui a plu. Il y a plein d’exemples cette année qui succède à quelques années fastes pour les jeunes groupes avide d’une gloire rapide. Et qui s’en sortent plus ou moins bien. Un conseil qu’on peut leur donner c’est de s’inspirer de cet album de Feist.
Elle met donc à la fois ce qui marchait sur Let It Die et réussit ce qu’il y a de nouveau. Sans tomber dans un mid-tempo systématique plus accessible commercialement. C’est peut-être moins cohérent puisque à côté de morceaux plus introspectifs comme ceux du précédent album figurent des titres plus directs et emmenés. Elle se débrouille dans les deux registres de toute façon. Même si ici la surprise c’est que c’est surtout les morceaux un peu plus enlevés qui emportent le plus facilement l’adhésion. I Feel It All ou My Moon My Man sont accrocheurs en diable, basés sur des gimmicks de premier ordre (le piano dans le premier cas, la basse dans le second). Le tout grâce à des arrangements impeccables, gardant toute la rugosité nécessaire. Par la voix ensuite, celle qui nous avait séduit et nous recharme instantanément. Il y a des chanteuses qui ont un organe immédiatement émouvant, c’est comme ça, il faut l’accepter. Et l’accueillir en l’occurrence. Alors que Let It Die comportait pas mal de reprises, on n’en compte qu’une ici, Sea Lion Woman de Nina Simone qui touche au gospel mais avec une guitare bien amenée. Cette chanson s’inscrit de toute façon assez naturellement dans son répertoire. On terminera la liste des réussites plus pêchues par Past In present et son entrain communicatif. La guitare y est discrète, simple, un modèle.
Mais qu’on se rassure, elle garde aussi ses tendances lo-fi (The Park) quand même. Parce qu’il ne lui faut pas grand chose pour être émouvante (The Water) sans être misérabiliste ou ennuyer. C’est qu’elle a le bon goût de ne pas jouer sur le même climat. Même dans le registre plus lent, elle peut étoffer le morceau d’un piano par exemple sur l’impeccable slow There’s A Limit To Your Love. Il y a d’autres petites douceurs comme Brandy Alexander qui montre qu’elle n’est pas une chanteuse comme les autres. Dans ce cas, on s’attardera plus sur l’ambiance dégagée que sur les qualités intrinsèques pourtant présentes. Intuition semble un peu indigent quand elle se sent obligée de partir dans des vocalises pour remplir l’espace sonore. Puis viennent des chœurs nombreux et sous-mixés. Honey Honey est aussi plus anecdotique. Finalement, les titres plus lents mis à la fin (les quatre derniers) apparaissent comme moins embalants que ceux de la première partie de l’album. Elle s’en sort avec les honneurs dans le genre mais c’est moins frais que sur Let It Die. Pris dans le contexte de l’album, ces pièces trouvent leur justification dans l’impression de douceur générale qui s’en dégage.
Elle a une voix faussement fragile, installant l’intimité en trois secondes, mais qui peut sortir de ses gonds, ce qu’elle fait plus ici. On a toujours l’impression qu’elle nous parle à l’oreille, rien qu’à nous. Sauf que maintenant, on sent qu’il y a plus d’ampleur, donc des gens autour. Ce n’est pas gênant. On peut la partager après tout, il faut que tout le monde en profite. Et puis avant de connaitre une certaine notoriété, elle a collaboré avec le collectif Broken Social Scene, notamment sur leur excellent You Forgot It In People. Elle s’inscrit donc dans la lignée de leurs bonnes chanteuses avec Amy Millan et Emily Haines. Heureuse scène de Toronto (Do Mak Say think, Stars, The Dears...) décidément.
La petite Leslie (31 ans quand même) sa grandi. Ce n’est plus un petit oiseau touchant tombé du nid, c’est une femme qui réussit ses audaces. Elle a énormément voyagé et les chansons parlent de ça, de l’éloignement, des relations impossibles à nouer, de la solitude. La longue attente depuis Let It Die (presque trois ans) se voit donc récompensée par un album plus varié, plus mature et même meilleur. La chanteuse de Calgary a cru bon nous soumettre un Reminder pour ne pas qu’on oublie qu’elle est une des auteur-interprètes marquantes de notre époque. Il en résulte une des réussites de cette année.
Les choses sont sans doute un peu plus simples depuis que Spencer Krug officie sous son nom propre mais ce n’est pas ça qui a ralenti sa légendaire productivité. Pour jeter un peu de confusion tout de même, il reprend la route avec Sunset Rubdown...
La transition de Moonface à Spencer Krug s’est faite en même temps que son apparition sur Patreon. En gros, c’était le versant plus personnel, distillé (...)
En général, la productivité d’un.e artiste croit rarement avec les années. Mais il y a des exceptions. Alors que leur rythme était plutôt d’un album tous les trois ans, Metric livre déjà un successeur au Fromentera sorti l’an passé. Il se présente d’ailleurs comme le second volet d’un dyptique. La premier nous avait d’ailleurs laissé une impression très favorable, avec en exergue un dantesque Doomscroller (...)
Peu de groupes ont pu garder une image de sympathie aussi tenace au fil des années. Avec ce neuvième album pour autant de critiques ici, pas de doute, on est en terrain connu. La continuité est aussi assurée par ce line-up inchangé depuis le dernier album et le même Patrick Ford qui assure la production tout comme celle de !!!.
Ce titre d’album fait une entrée immédiate dans les plus improbables. (...)
On n’a qu’une chance de faire une première bonne impression. C’est via un album soyeux qu’on écoute encore beaucoup 20 ans après qu’on a fait connaissance du talent tellement attachant de Leslie Feist et on n’a jamais décroché parce qu’elle ne nous a jamais déçus non plus.
On n’a qu’une chance de faire une première bonne impression. Et c’est avec le délicieusement psychédélique In Lightning qu’elle revient (...)