jeudi 13 décembre 2007, par
un savant doseur de sons
La première fois que j’ai entendu parler de Frank Riggio, c’était sur un forum d’Amon Tobin. Le fil de la discussion en était à proposer des artistes faisant de la musique similaire et des noms d’artistes à la popularité grandissante étaient cités.
Il est vrai que, personnellement, je m’étais fait la réflexion de savoir qu’écouter dans le style entre deux releases du sieur Tobin et qu’il n’était pas possible qu’il fusse magicien pour être le seul au monde à maîtriser cette technique de mixage "sample-based". Pour être correct, on sait qu’il n’est pas le seul, l’album Endtroducing(1996) de DJ Shadow est d’ailleurs dans le livre des records pour être le premier album entièrement basé sur des samples, et une playade d’autres artistes usent de cette technique depuis des années mais sa manière de mêler les samples pour former de nouvelles textures est tout à fait singulière et innovante dans ce domaine, et surtout dans un style/genre qui lui est propre. [1] Il n’est donc pas étonnant que cela crée des émules.
C’est, dans ce contexte, que Frank Riggio a abandonné les productions hardtek pour relever le défi de la composition "sample-based" [2]. Défi relevé puisqu’on peut dire que ce premier LP est réussi. C’est même une prouesse tant la qualité du mix et du bricolage de samples est élevée et comparable à ses "encore jeunes" prédécesseurs. Et la comparaison avec un Amon Tobin se fait surtout sur la technique de mixage et sur le travail des rythmes et pas spécifiquement sur l’ambiance. On penserait même qu’il a sniffé une certaine technique à Tobin, comme un Grenouille, personnage de Süskind, qui recouvre la formule d’un parfum complexe, c’est dire la performance...
L’ambiance par contre dépend du choix des samples, et cela dépend plus du feeling du compositeur [la composition étant une question de choix traduisant une partie de la personnalité du compositeur], et à ce niveau Frank Riggio se place à la croisée des chemins de toutes ces influences triphop/cinematic/breakbeat. En réponse de breton, cela donne : moins hiphop et roots qu’un DJ Shadow, plus cinematique qu’un Tobin, moins émotif qu’un Badalamenti et plus spasmatique qu’un Bonobo...
L’album se positionne dans un certain équilibre, avec un certain ton de réserve, beaucoup de titres comme Open 7 Days ou Lithium donne une impression de puissance de par la complexité du rythme, mais c’est en même temps mêlé à une cinématique downtempo qui asagit le morceau, c’est peut-être ça une force tranquille.
Articulation est un morceau un peu à part du reste de l’album, puisqu’il possède une partie vocale qui révèle un style abstract hiphop, une voix magnifiquement cutée qui donne un groove incroyable tout en retenue.
D’autres morceaux comme Hexalight, Minass Morgul ou Dark Adaptation possèdent des parties vocales mais plus "backing" que "lead", dans un style Cinematic Orchestra. En fait en faisant plus attention on remarque que la voix est utilisée dans la plupart des morceaux comme un instrument positionné à égalité avec les orchestrations de cordes et autres mélodies de guitare.
On note également des accents orientaux par moment, principalement sur le morceau Momentum, qui présente d’ailleurs un mélange de mélodies occidentales et orientales, comme une confrontation de deux mondes. Imaginez strauss au japon. Très retenu et dosé, ce morceau aurait été parfait pour la musique du "dernier samurai".
C’est même une qualité générale, on s’imagine facilement dans des films esthétiques, du grand cinéma. C’est peut-être ce qui a inspiré Vincent Papaix pour la réalisation du clip de Cinetic Energy.
En y réfléchissant, ce clip est un bon reflet de l’album, pour la rapidité des évènements autour d’un propos plus posé, pour les champs de blé qui ne sont pas sans rappeler la musique de Badalamenti sur les champs de maïs dans "The Straight Story", pour cette certaine mélancolie.
Signalons encore que Frank Riggio a demandé à Laurent Collat de se charger du mastering. Ce dernier, également connu sous le nom d’Elegia, est réputé sur la scène électronique française pour ses divers travaux de mixage et mastering pour des artistes tels que Snooze, Laurent Garnier, Wax Taylor...
En conclusion, cet opus s’adresse aux amoureux de la musique d’ambiance qui par des sons fait resurgir des émotions, des souvenirs, à ceux qui apprécient une certaine complexité sans tomber dans la prise de tête. De ces ambiances aux teintes obscures se dégage une certaine finesse, c’est peut-être pour cela que l’ensemble est Visible In Darkness. On ressent un besoin de perfection, la structure est souvent impeccable sans tomber dans l’enfermement des boucles. Le reproche que l’on pourrait faire à cet album est peut-être le manque de titres émergents, ce qui n’enlève rien à la qualité générale des morceaux.
Frank Riggio est signé sur le jeune label CCTRecords, qui peut se targuer d’avoir d’hors-et-déjà un catalogue intéressant d’artistes ayant une grande maîtrise de la production électronique. En attendant que le système de vente en ligne de CCTRecords soit opérationnel (Edit : maintenant opérationnel), il est possible de précouter et d’acheter Visible In Darkness sur emusic.
http://www.myspace.com/riggiofrank
[1] Aujourd’hui AT a abandonné l’emprunt de samples (Foley Room) pour travailler avec les siens, mais sa technique reste similaire.
[2] Egalement qualifiée par AT de "music from the music"
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