Accueil > Critiques > 2007

Jean-Louis Murat - Charles et Léo

vendredi 9 novembre 2007, par marc

Le reste du chemin


Avec un septième article, on peut dire que Jean-Louis Murat est le grand habitué de ce site. Mais il faut bien avouer que c’est moins notre passion qua sa prolixité qui en est la raison. Ne vous méprenez pas, j’attends toujours un de ses albums si pas avec impatience du moins avec curiosité. C’est qu’on ne peut jamais prévoir les revirements de sa discographique, tant au niveau des projets que de leur qualité.

Charles et Léo, ce ne sont pas deux potes de Jean-Louis, c’est plutôt les prénoms de Baudelaire et Ferré. Le second en effet avait pour projet de mettre en musique les poèmes du premier. Il l’avait déjà fait mais n’a pas eu le temps de mener à terme ces compositions-ci. C’est donc un matériel de premier choix que les héritiers ont laissé à Murat. Et le moins qu’on puisse dire c’est qu’il en a fait un bon usage. Après Madame Deshouillères la poétesse du 17ème siècle et Béranger (1829), la mise en musique du patrimoine, procédé aussi vieux que la chanson française puisque Ferrat, Brassens ou Barbara l’ont pratiqué n’est dont pas un exercice nouveau.

Bien sûr, je mentirais en disant que la langue est d’une vibrante actualité, mais le décalage est moins difficile que prévu. Moi qui n’ai jamais été un amateur de poésie, je découvre des merveilles. Le Madrigal Triste (vraiment bouleversant), La Fontaine de Sang ou l’Heautontimoroumenos sont d’une sombre beauté que la voix de l’Auvergnat magnifie. Evidemment, on peut considérer qu’emprunter à une valeur établie est une facilité, mais rendre une actualité à des textes d’une insolente beauté dans une variété française volontié nombriliste était la véritable gageure. Quand une Carla Bruni reprend d’impeccables poèmes anglais pour en faire un terne et lisse brouet folkeux, Murat tente une forme certes pas révolutionnaire mais plus en phase avec le spleen et la subtilité du propos.

Musicalement, les anciens fans seront tout de suite à l’aise. C’est qu’après ses escapades tenant plus d’une tradition d’outre-Atlantique (Mustango, Taormina) ou de la pop Anglaise (A Bird On A Poire), il retrouve Denis Clavaizolle, le partenaire de l’époque de Cheyenne Autumn ou Dolores, ses derniers albums au son plus froid. Pas de guitare à l’horizon, vous voilà prévenus. Il a toujours su s’entourer de chanteuses de talent (Jennifer Charles, Camille) et la nouvelle arrivée Morgane Imbeaud (du duo français Cocoon) poursuit la tradition. Elle est simplement impeccablement à sa place.

D’un projet a l’allure élitiste et vaine, il fait une relecture littérale et très convaincante. Ca a beau être scellé ‘bon gout patrimonial’, en tant qu’objet culturel, c’est une indéniable réussite. Prendre de bonnes mélodies sur des textes insolents d’excellence ne garantit jamais un bon résultat mais le reste du chemin vers de bonnes chansons a été accompli.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

2 Messages

  • Fabien Martin - Je ne fais que marcher dans la montagne

    Non, sincèrement, il en reste encore beaucoup des chanteurs français à découvrir ? Entre Max Darmon, Acquin ou Prattseul, cette année a été riche en rencontres. On ne va pas s’en plaindre, c’est certain, parce que la connivence s’est établie assez vite.
    Evidemment, on a pensé tout de suite à Florent Marchet pour cette propension à mêler morceaux avec récitatifs et ’vraies’ chansons. Disons-le aussi, on (...)

  • Muet – Le Pic De Tout

    Après un EP qu’on avait déjà beaucoup apprécié, le duo Muet propose un album qui ne surprendra pas ceux qui s’étaient déjà frottés à l’univers de Colin Vincent et Maxime Rouayroux, surtout que quelques morceaux de l’EP se retrouvent aussi ici.
    On pense toujours à Thom Yorke au niveau du résultat mais aussi de la démarche, du projet parallèle pour explorer des pistes plus abstraites en marge d’un groupe plus (...)

  • Simplement Sheller

    En haut de la liste des critiques fastidieuses, il y a les compilations d’hommages. Disparates dans leurs intervenants et hétérogènes dans les résultats, ils sont aussi sympathiques à picorer que compliqué à résumer. Sur le papier pourtant, il y a beaucoup de raisons de se coltiner celui-ci. Come des participants chers à nos cœurs et un répertoire pas trop usé qui a ses perles qui ont souvent eu le (...)

  • Glauque – Les Gens Passent Le Temps Reste

    Pendant plusieurs années, on a pris l’habitude de croiser des morceaux de Glauque, à un tel point qu’on était persuadés que ce premier album n’en était pas un. Mais entre recevoir un morceau percutant de temps en temps et enchainer autant d’upercuts d’un coup, il y a tout de même une fameuse marge.
    Evidemment, le champ lexical de la boxe n’est pas facile à éviter ici. ‘Album coup-de-poing’ est un (...)