Accueil > Critiques > 2008

Tindersticks - The Hungry Saw

mercredi 7 mai 2008, par marc

Plaisirs simples


Un jour, comme ça, sur je ne sais plus quel conseil, j’ai emprunté le second album des Tindersticks, dénué de titre comme son prédécesseur. Un peu machinalement, je glisse le cd dans la platine, puis vaque à mes occupations. Pas longtemps. Le second morceau s’appelle A Night In et je reviens fissa vers la stéréo. Une écoute. Et puis des autres. Ca existe donc, ça ? On peut générer des sentiments avec des sons ? Les années 90 ne seraient donc pas complètement pouraves ? Il va de soi que la peu passionnante narration d’une scène qui s’est déroulée en 1995 n’a qu’un but : vous dire que Tindersticks comptent pour moi. Si le côté fan disparait avec l’âge, certaines références restent et le sextet de Nottingham en sont une.

Après deux premiers albums qui ont marqué beaucoup d’auditeurs, ils sont passés progressivement à une soul blanche soyeuse, que la voix profonde deStuart Staples porte si bien. Puis ils se sont un peu dilués. Cet album reprend plus les choses où ils les avaient laissés au moment de Simple Pleasures. Même si l’attente avait été partiellement comblée par deux albums de Stuart Staples, ces derniers étaient plus nus et servaient d’écrin à l’organe suave du très classieux Stuart. On retrouve ici un foisonnement supérieur, une marque de fabrique qu’on est contents de retrouver au détour d’arrangements de cordes reconnaissables et d’égrènement d’arpèges de guitare

Une longue introduction instrumentale installe l’ambiance, lentement. Et puis ça déroule, sans vraie surprise mais avec un plaisir simple. Les nombreuses écoutent renforcent la confusion : confond-on les titres de cet album avec de plus anciens ou est-ce la connivence qui s’est installée ? Impossible à présent de le dire, j’aurais dû pour ça privilégier les analyses à chaud dont je suis si peu friand. Dans cette optique, tout n’apparaît pas comme unique et inoubliable, mais dans un contexte bien choisi (une déambulation urbaine un samedi matin brumeux par exemple) l’effet est garanti. Quand la mélodie se met à être belle et que l’intensité monte d’un cran, on se souvient de tous ces moments qu’on leur doit. Et c’est bon, vraiment bon, ce Boobar. D’autres morceaux marquent plus comme The Other Side Of The World dans leur veine plus lente. Par contre, les instrumentaux comme Type E ou The Organist Entertains sont bien dans l’ambiance générale mais je ne pense pas que leur absence se remarquerait plus que ça. On notera aussi quelques touches plus dissonantes, plus aventureuses au détour d’un Mother Dear.

Pas vraiment ancrée dans les années ’90 qui l’a vu éclore, la musique des Tindersticks reste intemporelle et résiste aux modes. Restait à donner une suite discographique à une carrière brillante. La surprise n’est pas vraiment au rendez-vous mais on ne voit pas pourquoi on réclamerait autre chose que ce qu’on aime chez eux. Avec quelques compositions à la hauteur des meilleurs moments de leur nouvelle orientation (prise il y a dix ans), l’amateur n’aura aucune raison de bouder son plaisir.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

2 Messages

  • Tindersticks - The Hungry Saw 19 novembre 2009 19:12, par Le cousin de la Reine de trèfle

    Bien vu (bien écouté...) intemporelle et classe , reconnaissable entre toutes,la musique de mes anglais préférés ( avec Iliketrains )reviens murmurer , même mes chats écoutent ...
    ambiance exceptionnelle, au soir
    mais je préfèrerai toujours les 3 premières oeuvres
    vive le raffinement, vive la soie & le velours
    bonne nuit

    repondre message

    • Tindersticks - The Hungry Saw 20 novembre 2009 15:36, par Marc

      Coincidence, je viens de relouer les deux premiers albums. Même 15 ans après les premières écoutes, et même après autant d’autres albums écoutés entretemps, ils ont toujours leur impeccable classe et puissance. Le live à Bloomburry est aussi remarquable.

      repondre message

  • Sarah Mary Chadwick - Messages To God

    Dans une ère où toutes les émotions sont passées sous l’éteignoir d’une production qui lisse, il est plaisant de rencontrer des voix (forcément) discordantes comme celle de la Néo-Zélandaise Sarah Mary Chadwick sur son huitième album solo. On se frotte d’emblée à ce ton naturaliste et direct qui n’est pas sans rappeler Frida Hÿvonen. Frontal donc, d’une sincérité qui peut aller jusqu’au malaise. La dernière (...)

  • Anohni and the Jonsons - My Back Was a Bridge for You to Cross

    Une limitation connue de la critique est qu’elle intervient à un temps donné, dans un contexte. Or on sait que les avis ne sont jamais constants dans le temps. Ainsi si I am a Bird Now a beaucoup plu à l’époque, on le tient maintenant comme un des meilleurs albums de tous les temps, tous genres et époques confondus. Cette proximité crée aussi une attente quand que les Jonsons sont de nouveau de la (...)

  • Jungstötter - Air

    Quand on a découvert Jungstötter, c’était presque trop beau pour être vrai. En se situant aux confluents de tant de choses qu’on aimait comme Patrick Wolf ou Soap&Skin (dont il a assuré les premières parties) ou Anohni, il a délivré avec Love Is un de nos albums préférés de ces dernières années. C’était aussi l’occasion de retrouver des collaborateurs talentueux comme P.A. Hülsenbeck qui d’ailleurs est (...)

  • Lana Del Rey - Did You Know That There’s a Tunnel Under Ocean Blvd (...)

    Généreuse dans l’effort, Lana Del Rey l’est certainement, et il faut l’être pour livrer aussi régulièrement des albums aussi consistants. Surtout s’ils sont entrecoupés de recueils de poésie. Maintenant, on peut s’affranchir d’un rappel des faits précédents. On remontera juste jusqu’au formidable Noman Fucking Rockwell ! pour signaler qu’il y a eu deux albums jumeaux en 2021 qui l’ont vu à la fois revenir à (...)