Accueil > Critiques > 2021

INSTITUT - L’effet waouh des zones côtières

mercredi 21 avril 2021, par marc


L’humour n’est pas seulement l’ultime politesse du désespoir mais sans doute une des meilleures armes pour décrire le réel par la bande. On ne pourra pas faire l’économie de Didier Super pour comprendre notre époque. A une distance assez respectable de cet aspect potache se trouve l’ultra-moderne solitude d’INSTITUT. L’humour est la meilleure façon de se faire des amis. Ou d’en perdre plein, c’est selon. Mais ici, la connivence s’établit assez vite. Avant même l’écoute d’ailleurs, un petit coup d’oeil aux titres (voir le player ci-dessous) se révélant fort engageant.

Le premier degré c’est fort, ça frappe quand c’est bien fait, il n’y a pas d’équivoque. Ceci est plus détourné, voire même un peu plus subversif. On est assez proche de l’esprit du Message à Caractère Informatif par exemple. Dans les façons de raconter notre monde, on peut penser aussi à Michel Houellebecq mais sans le commentaire, ils restent dans l’évocation et c’est très bien comme ça. L’observation et sa consignation sont aussi des armes. On l’a déjà signalé pour des œuvres comme Frère Animal, si réussies soient-elles, privilégient un angle dramatique. Ici, ils peuvent se lancer dans un peu de crudité sans que ça ne choque (même en évoquant Bolsonaro en objet de désir…), ce qui est un petit exploit.

Installer un album dans le présent fait courir le risque d’apparaître connoté (après-)demain (On se voit demain/En présentiel). Est-ce que ce sera dans 60 ans aussi insupportable que La Java Des Bombes Atomiques ? On n’en sait rien en fait, on ne va pas s’en soucier pour le moment, surtout que la possibilité de prendre un peu de recul sur notre époque est salutaire. Prenez Soin de Vous fait clairement référence au confinement et on préfère garder ça en mémoire pour le futur que les foireux concerts confinés qui nous ont encombré l’année 2020.

Et musicalement ? Eh bien ça tient fortement la route. Même sans le contenu, on aurait aimé la forme. Parce que le fond se mêle bien à cette pop synthétique à la belle densité. Il faut en effet du synthé vintage pour que la dream-pop intense de Je Suis Dans La Data puisse distiller sa mélancolie infinie. On retiendra aussi à ce titre le très beau final de Comme Un Coach en Éveil de Conscience.

Paradoxalement, la mélancolie narquoise d’INSTITUT est un réconfort. Parce qu’on a besoin de ne pas prendre trop au sérieux notre fatigante époque. Le trio français (Arnaud Dumatin, Emmanuel Mario et Nina Savary) choisit d’en rire mais pas trop, d’en souligner avec une certaine gourmandise les excès de langage et il faut le dire, ça nous fait beaucoup de bien.

    Article Ecrit par marc

Répondre à cet article

2 Messages

  • INSTITUT - L’effet waouh des zones côtières 21 avril 2021 18:16, par Laurent

    Nous y voilà donc enfin, à cet effet waouh. Je me disais bien que le titre m’était familier ! Prenez soin de vous avait accompagné mon confinement et remporté son petit succès critique dans divers groupes Whatsapp ; entre-temps j’avais découvert Je suis dans le data qui ne m’avait pas autant convaincu. J’ai donc hâte, en lisant ton point de vue enthousiaste, de savoir ce que ces gens nous réservent sur la longueur.

    repondre message

  • Dominique A – Quelques Lumières

    On connait pourtant bien la discographie de Dominique A. On l’a vu en concert en salle, en plein air, en festival, tout seul, en trio, en quatuor, avec une section d’instruments à vent, délicat ou très bruyant, acoustique ou post-rock. On sait qu’il peut tout tenter et tout, Donc une relecture avec orchestre ou plus intimiste, pourquoi pas ?
    La réponse cingle après quelques secondes, avec la (…)

  • Ektör - Ektöristan

    Cette nouvelle sortie de Bitume productions ne fait pas dans la musique extrême, c’est à signaler au moment d’aborder cet étrange objet musical. On est plus dans les dingueries math-rock et prog, le genre qu’on avait entendu du côté de Chocolat Billy ou Joy as a Toy. Et pour assumer le genre, il faut du niveau, qui est là d’emblée et reste tout au long de ce court album sans scorie.
    Ceci est (…)

  • Paris Orly – La Réserve

    Le fond et la forme. La forme et le fond. Paroles et musique. La dualité est bien connue et on la retrouve ici, bien mise en avant sur ce premier album de Stéphane Loisel. Des mélanges sont encore à tenter et celui-ci a sa personnalité propre.
    Sur la forme tout d’abord, on peut dire que c’est réussi puisque des versions instrumentales pourraient fonctionner. Italo-disco, electro, le (…)

  • Claude - In Extremis

    Si quand on vous dit ’In Extremis’ vous pensez Francis Cabrel, il est temps de se pencher sur les plus jeunes pousses de la chanson française. Outre Oscar Les Vacances dont on aurait dû vous parler, on avait déjà identifié Claude comme un espoir certain après un premier EP qui avait marqué.
    Aucun morceau de cette première publication ne se retrouve ici, mais l’éclatement des aspirations est (…)