Accueil > Critiques > 2012

Benjamin Schoos - China Man vs Chinagirl

dimanche 15 juillet 2012, par Marc

Flémalle sur Seine


L’histoire qu’on a avec Benjamin conditionne la vision qu’on peut avoir d’un album. Pour moi, Benjamin Schoos, c’est d’abord Miam Monster Miam. Découvert avec un premier album délirant et puis dans La Petite Maison Dans La Prairie de Dour du temps où ce n’était pas encore un énorme chapiteau. Il est donc difficile de prendre cet album au premier degré en première écoute. Mais ce n’est pas dérangeant puisque ce léger décalage est une des raisons de se réjouir.

Évidemment, il y a bien peu de bricolage ici, et il faut dire musicalement, c’est une réussite. L’accent serésien est en tout cas assez méritoirement masqué, et il emploie fréquemment le parlé/chanté. On comprend pourquoi quand il chante vraiment (La Chinoise).Parfois aussi, il se lance carrément dans un récit comme celui d’Arthur Caravan.

Au final, Benjamin se trouve plus près de la densité d’un Biolay que de la gaudriole. Avec un côté mitraillette-andalouse (côté qui ressortait dans ses hilarantes parodies DJ 50 centimes) pas trop marqué mais une noirceur assez différente. Le spleen de Biolay est plus intellectuel, ce n’est pas le même que celui de Flémalle. C’est là que le mélange entre classicisme et belgitude discrète peut donner son meilleur, avec cette absurde histoire de catcheur forcément looser qui rencontre une lutteuse chinoise qui va le démolir. C’est le titre de l’album, qui joue sur les deux acceptions de ‘china’ en anglais. Vous le comprendrez de gré ou de force, il répète bien plus que nécessaire.

Pour Catch, on pense à Gainsbourg, mais les débuts, ce qui a précédé sa popularisation par les yéyés. Pour ceux qui connaissent, tout ce qui s’est fait aux alentours du Jazz Dans Le Ravin. Comme pour Biolay, c’est dans ces exercices d’hommage très littéral qu’il est le moins intéressant.

Avec son label Freaksville, Benjamin a rassemblé autour de lui une jolie bande, et on retrouve logiquement quelques membres de ce groupe. Heureusement, ce ne sont pas Lio et Mademoiselle Nineteen qui sont là, mais Marie-France qu’on retrouve plus logiquement avec une plus surprenante Chrissie Hynde dont accent est assez similaire à celui de Jenifer Charles. Laetitia Sadier m’inspire toujours un peu d’ennui dans ses collaborations toujours de haut niveau, et beaucoup d’ennui dans son dernier album solo récent, mais le simple Je Ne Vois Que Vous qui a eu son petit succès outre-manche est impeccable. J’en profite pour dire que lors du concert de Barbara Carlotti, la similitude de leurs voix m’avait frappé. On sent aussi la patte de Duval sur A Mort L’Amour ou Un Garçon qui pleure, petits contes cruels et laconiques comme il les affectionne.

Mark Gardener quant à lui était tout de même chanteur de Ride. La voix a beau ne pas être le point fort de ce groupe essentiel, son Worlds Away est pourtant convaincant. Sans la voix de Benjamin, on prend conscience que l’exercice, pas si éloigné en fait de la relecture sixties des Last Shadow Puppets.

Étrange assemblage donc que cet album, entre folie douce et arrangements classieux, entre absurde et classique. Benjamin Schoos a depuis longtemps tourné le dos à ses super héros de bd, mais il se rapproche de ceux de sa vraie vie.

http://www.miammonstermiam.com/

    Article Ecrit par Marc

Répondre à cet article

  • Dan San - Grand Salon

    On ne va pas se mentir, il faut une petite adaptation à l’entame de ce nouvel album de Dan San. Eux qu’on avait vu évoluer d’un folk ample à un folk puissant avant d’incorporer des éléments plus psychédéliques. La trajectoire vers toujours plus de légèreté ne sera pas infléchie par ce troisième album.
    Les voix ne sont plus aussi typées, même si elles poussent encore parfois à l’unisson. On pense même (...)

  • KermesZ à l’Est - Octophilia

    On a beau tenter de les combattre, les préjugés ont la vie dure. Quand on se lance dans l’écoute d’un album qui revendique des sources festives d’Europe de l’Est et qu’on voit certaines photos de presse, on s’attend quelque chose de plus bordélique qui du reste aurait pu coller au genre. Mais d’emblée, les transitions et la puissance ne laissent aucun doute, c’est une grosse maitrise qui est à l’œuvre, (...)

  • The Imaginary Suitcase - Alone, we go faster. Together, we go further (...)

    Dix ans déjà et maintenant dix critiques de notre côté (on se place tout de même comme exégètes officieux), c’est le temps de la célébration. Pour fêter ça, ce n’est pas vraiment le genre de la maison de sortir une best-of pour les fêtes. Par contre, profiter de l’occasion pour retrouver des collaborateurs qui l’ont accompagné, c’est bien plus le genre de Laurent Leemans. Regarder dans le rétroviseur pour (...)

  • Sïan Able - Veni Vidi Sensi

    D’accord, un premier EP qui plait, c’est un bon début mais confirmer avec un bon premier album, c’est l’étape cruciale d’une carrière. Donc Sïan Able (anagramme de son vrai nom Anaïs Elba) passe la vitesse supérieure et son talent ne se dilue pas dans la taille d’un album.
    On l’a déjà dit, les styles plus soul ne sont pas nécessairement ceux qu’on goûte le plus. Pourtant on l’avait tout de suite adoptée, (...)