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Séance de Rattrapage #82 - Karine Germaix, Kreda, The Somnambulist

mercredi 12 février 2020, par marc


Karine Germaix - Incandescence

L’accordéon est un instrument extrêmement connoté, associé à des styles de musique bien particuliers, même s’il a déjà été introduit dans le rock indé par des formations comme Beirut ou 16 Horsepower. Quand on associe chanson française et accordéon, on pense donc à des choses comme la chanson réaliste ou le rock festif. Rien de celà a priori ici, parce que l’ambition est plus ‘arty’.

Une fois le style considéré, on peut se consacrer aux chansons elle-mêmes. Et la meilleure illustration est lâchée d’emblée parce que c’est le morceau le plus habité par la fièvre (ça s’appelle Je Brûle), se distinguant le plus des canons gouailleurs qu’on a trop entendus. C’est de loin le meilleur de cet EP, celui qui nous a fait revenir.

Parce que le reste s’éloigne de l’ambition de base. L’expressivité du chant est au final plus en ligne avec une image tradi de l’accordéon. C’est la seule réticence mais elle dessert clairement le propos et ne permet pas de succomber aux autres morceaux. Les passages instrumentaux restent donc percutants (Le Pressoir), confirmant l’impression originelle quand les textes ne justifient pas l’interprétation surjouée (Des Mots Crazy). C’est donc sur le premier morceau qu’on se concentrera, cherchant surtout dans les moments les plus créatifs (L’Apnée) de la Belge la voie à suivre dans le futur.

Kreda - Crest

Projet de deux membres de Laibach (Mina Špiler et Matevž Kolenc) et d’un collaborateur de Roisin Murphy (Alastair McNeill), Kreda intrigue forcément. On s’éloigne ici fortement du déluge sonore industriel des premiers nommés et de la folie de la seconde pour quelque chose de plus léger et subtil.

La voix (ou même sa seule présence) est traditionnellement le maillon faible de ce genre de projet mais ici elle est très en place. On pense à une Beth Gibbons (logiquement) moins passionnée ou aux moments plus apaisés de Goldfrapp. Elle est en tout cas fort à son affaire dans ce qui pourrait s’approcher d’une certaine idée du trip-hop. Loin des chapelles pourtant, on apprécie quand The Overlay sort de sa coquille en toute subtilité.

Emotional Tides est plus apaisé, presque évanescent. Les structures sonores sont en général très travaillées et légères, avec un poil de lourdeur sur Never Talk. Bref, on est entré dans ce petit EP intrigué et on en est ressortis contents, en attente d’un album en bonne et due forme.

The Somnambulists - Hypermnesiac

La tension est au centre des préoccupations du trio The Somnambulust sur son quatrième album. Musique aventureuse mais qui privilégie la tension à la surprise, la rondeur du son aux brusques soubresauts, elle intrigue sans jamais déranger. Film nous introduit les choses de belle façon, avec un gimmick de piano qui soutient le tout, laissant à la rythmique d’assurer les variations. On sent que la musique est instrumentale et que la voix est un ajout ultérieur dans le processus de création. Elle est pourtant fort en place, donc utile.

Mais ce qu’on retiendra surtout ce sont les passages instrumentaux. Plus trippants sur At Least One Point at Which It Is Unfathomable qui se présente comme le morceau le plus ample de cet album. Ou bien plus épais sur le chorus de Doubleflower. Pourtant, ils ne l’étalent étrangement pas, alors que cette structure permettait sans doute plus de développement. C’est surtout sur Ten Thousand Miles Longer qu’ils se lâchent sur un mode qui doit autant au jazz qu’au math-rock. Ce ne sont pas des morceaux linéaires, No Sleep Until Heaven est un peu anguleux mais jamais dissonant, ils maintiennent le cap en faisant penser à des choses comme Bauhaus. Distille une ambiance électrique soutenue mais sans distorsion ni furie excessive, c’est un album brûlant comme on les aime.

    Article Ecrit par marc

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