jeudi 1er avril 2010, par
Au creux de la vague
« Le cap du difficile deuxième album ». À force de ressasser ce concept éculé, on avait fini par le galvauder et faire taire sa pertinence. Pourtant, combien de héros un peu trop vite déifiés ne s’y sont cassé les dents ? C’est que plusieurs options s’offrent aux artistes qui réussissent leur coup d’essai, et qu’aucune n’offre une garantie de transformation. En substance, on peut les classer en trois catégories.
1) Celle des musiciens qui proposent la copie conforme, généralement un peu plus maîtrisée, de leur liminaire. Citons en vrac Franz Ferdinand, les Strokes, Get Well Soon ou encore Beirut ; l’efficacité, en ce cas, est généralement intacte, mais le charme de l’effet de surprise, pour sa part, s’est bel et bien fait la malle.
2) Le deuxième cas de figure voit nombre de gens faire un fameux bond en avant entre leurs deux premières galettes ; le revers de la médaille est que le cap laborieux est ni plus ni moins reporté au troisième album. Si certains s’en sortent avec tous les mérites, confirmant leur statut d’exception (Radiohead, Elbow, Camille, Grizzly Bear...), d’autres en revanche révèlent ensuite leurs limites (Coldplay, Editors, The Streets, Placebo, et bien sûr le cas d’école Oasis).
3) La dernière possibilité entrevue par ces artistes souvent angoissés par la pression (ou pas), c’est le contre-pied. Certains, surfant sur la vague du succès, y voient le meilleur moyen de viser l’immédiateté pop (Daft Punk, Yeah Yeah Yeahs et autres Killers ont ainsi vendu leur âme au nom de leur gloriole), là où d’autres sont galvanisés par l’ivresse de la totale liberté artistique et cherchent à se réinventer, si possible à chaque nouvelle livraison (Animal Collective, Goldfrapp, dEUS à la grande époque).
Avec la sortie de "Congratulations", on pourrait ranger MGMT dans cette dernière famille. Déjouant sans vergogne les attentes de ceux qui avaient entendu, dans "Oracular Spectacular", une collection de tubes qui définissaient leur époque en frôlant la perfection, voilà que le duo formé par Ben Goldwasser et Andrew VanWyngarden, fidèle à sa pratique assidue du surf casse-cou – s’il faut en croire cette pochette si hideuse qu’on l’espère non définitive, le disque ne chatouillant les rayons que dans une semaine – attaque la vague à contre-courant. C’est pour le moins courageux, mais interprétable de deux façons fort différentes : soit le groupe a réellement souhaité évacuer la pression en enregistrant ce que bon lui semblait, soit il n’a pas été à même de rééditer le hold-up d’éternité qu’il avait si bien réussi il y a deux ans. La réalité, m’est avis, se situe quelque part entre les deux.
Bien sûr, il faudrait pouvoir faire abstraction du brillant passé de MGMT et se forcer à écouter "Congratulations" avec une oreille virginale, sans se laisser tenter par le jeu des comparaisons. Mais il y a fort à parier, dès lors, qu’on ne lui trouverait que des qualités anecdotiques ou, au mieux, sympathiques. Car là où son prédécesseur redonnait au psychédélisme à la californienne une vigueur toute contemporaine, ce deuxième album joue quant à lui la carte rétro à fond les ballons. Les concessions faites à la modernité sont ici vues à travers les yeux d’un groupe qui doit tout à Brian Wilson et Syd Barrett, mais pas grand-chose à Brian Eno – hormis le titre très hors propos d’un hymne surf moyennement réussi.
Le mot ‘surf’ revient souvent dans cette critique, parce qu’il est de circonstance : amis de la houle – ou cherchant à le faire croire avec leur look tongs et bermuda – les deux allumés de MGMT se tiennent en équilibre sur la déferlante Beach Boys, peu soucieux de savoir qu’elle est passée il y a cinquante ans et qu’elle ne risque pas d’évoquer grand-chose du côté d’Oostduinkerke. Peu ou prou, chaque morceau – pardon, plage – sonne comme sorti(e) d’un juke-box vintage, tant sur le plan du fond que de la forme, la production possédant ce côté amateur sans doute voulu et néanmoins peu avenant.
On pourrait arguer que, vieillots ou pas, la plupart des extraits n’en sont pas moins des hits. Passéiste jusqu’au bout, l’album se concevrait alors comme dans les glorieuses sixties, se devant d’être d’abord un recueil de singles en puissance. Et il est vrai que des cavalcades telles que Flash Delirium, It’s Working ou Song for Dan Treacy ne manquent ni d’entrain ni d’intelligence. Il n’empêche que, venant du groupe qui a pondu Kids et Time to Pretend, ça laisse sur sa faim.
Ceux qui ont vu MGMT en concert savent pourtant deux choses : primo, que si le grand public les perçoit essentiellement comme des performers pop, eux s’envisagent plutôt comme un combo rock ; et secundo, que leurs prestations scéniques ne sont pas à la hauteur de leur statut. Alors, dans quelle mesure faut-il se résigner à les considérer comme un groupe baudruche ? Sans aller aussi loin, on dira simplement que leur intention est louable mais leur démarche, maladroite.
Exemple flagrant : Siberian Breaks, morceau de 12 minutes dont le titre résume bien le programme – des montagnes russe aux fréquents arrêts brutaux – qu’on aurait pu qualifier d’audacieux s’il n’avait consisté en un collage patent de six ou sept idées de chansons et si, surtout, MGMT n’avait déjà fait le coup avec Metanoia, face B épique qui redonnait un salutaire coup de bambou à leurs concerts. À côté de ça, on appréciera surtout les deux derniers morceaux de l’album : l’instrumental Lady Dada’s Nightmare et sa conception délicieusement ringarde de l’épouvante – on se souvient que le groupe a débuté en reprenant ad libidum le thème de Ghostbusters – et un Congratulations classieux mais qu’on n’est pas sûr de vouloir leur adresser.
À vous de vous forger une opinion sur ce deuxième album – que le duo a offert en libre diffusion sur son site – car pour ma part j’ai du mal à trancher. Considérant qu’elles souffrent peut-être d’un piètre emballage – et je ne parle plus ici de la pochette – on pourrait trouver quelque charme à ces chansons, du reste, pas trop mal torchées. Mais tout de même, difficile d’être plus dérouté par l’orientation quasi autistique que vient de prendre MGMT. Pour un groupe dont le nom se prononce « management », voilà en tout cas un curieux plan de carrière.
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